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lais, et ce que l’on buvait dans les années 1650 na plus rien a voir avec les nectars
de l’aube du siecle des Lumiéres. Cette évolution nest cependant pas uniforme et
n’affecte pas l’ensemble des terroirs. Alors que les Graves, le Médoc et le Sauter¬
nais font la part belle aux productions de qualité, les vins de palus et de l’'Entre¬
Deux-Mers restent des boissons de grande consommation. Au sein même du
monde parlementaire, les « seigneurs des vignes » comme Ségur côtoient de plus
modestes « vignerons » comme Labat de Savignac®. Le changement du produit
est cependant réel et fut impulsé par les magistrats qui, soucieux d’améliorer leur
production, n’hésitèrent pas à faire évoluer les modes de faire-valoir.

Les modes d'amodiation : une clef de la
mutation des vignobles bordelais ?

Peut-on repérer, dans le choix des modes d’amodiation, les signes de la modernité
et d’une potentielle avance parlementaire* ? De façon très classique, les magistrats
ont recours aux trois modes de mise en valeur existant, le faire-valoir direct, le
fermage et le métayage, mais le faire-valoir et ses infinies nuances prime pour le
vignoble.

Le contrat de prix-fait et ses dérivés

L'une des modalités en est le prix-fait*, qui consiste à engager une personne char¬
gée d’un certain nombre de travaux pour une parcelle, en échange d’un salaire.
Sur le domaine de Haut-Brion, vers 1689-1690, on a principalement recours à un
personnel temporaire, engagé par contrat annuel ou à la tâche, ce qui témoigne
d'« une organisation encore archaïque, fondée sur le contrat temporaire de tra¬
vail »?7. Ce même système se rencontre aussi chez d’autres magistrats. On prendra
pour exemple le contrat passé entre Anne Daffis, épouse du président Bernard de
Pichon, et Pierre Faure, vigneron de la paroisse de Bassens*®. Ce dernier s'engage
à prendre à prix-fait toutes les vignes de la palu de la maison noble de Carriet,
pour une durée de deux ans : il devra tailler, ouvrer, donner deux façons de bêche,

33 Caroline Le Mao, art. cit., p. 199-217.

34 Pour une réflexion méthodologique sur l’utilisation des baux ruraux pour l’étude du changement agri¬

cole, voir Jean-Marc Moriceau, op. cit., p. 152-158.

5 Gérard Aubin, La seigneurie en Bordelais d'après la pratique notariale (1715-1789), Rouen, PUR, 1982,
p. 76. Pour préciser la question en Sauternais, voir Stéphanie Lachaud, op. cit., p. 178-195.

3% Jbid., p.394.

57 René Pijassou, of. cit., p. 343.

3 AD 33, 3 E 7634, f° 131v, 4 novembre 1685, contrat de prix-fait. Voir aussi AD 33, 3E 7634, f° 229v,

16 décembre 1674, contrat de prix-fait, présentant des caractéristiques similaires.

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