les faveurs et les prédilections des deux grands Pontifes Pie IX et Léon XIII,
que Dieu a accordé a notre siecle dans sa clémence. Je sais avec quelle bonté
Léon XIII daignait l’accueillir ; il lui donna les insignes de commandeur de
Vordre Piano? et le nomma son camérier de cape et d’épée.
Manna fut des premiers 4 comprendre la nécessité des oeuvres laiques dans
ces temps troublés, a cette heure des dépouillements des forces extérieures de
l'Église et des audaces organisées et croissantes de ses ennemis. Ces paroles
d’un écrivain semblent résumer son inviolable attachement au siège de Rome :
« L’antique serpent change de peau et d'erreurs au soleil de chaque siècle.
Mais le Pape est Pierre, et cette pierre use chaque jour les dents de l’antique
serpent. »
A nous donc de lui répondre par le cri de guerre de l’archange victorieux :
Quis ut Deus ? À nous de combattre le bon combat, dans cette grande lutte
où nous avons pour nous quatre mille ans de promesse et deux mille ans de
victoire.
Sparte défendait à ses enfants de rester neutres dans ses guerres civiles ou
étrangères. Il faut aussi, sous peine de lâcheté, prendre part dans ce combat
permanent de l'erreur et de la vérité. Qui n’est pas avec Dieu est contre Dieu.
Que notre devise soit le mot de Tertullien : « In his omnis homo miles : La tout
homme doit étre soldat. »* Quelle que soit sa faiblesse, chaque chrétien doit
apporter sa pierre pour la défense de Rome et de l’Église, comme dans une ville
assiégée on voit accourir sur les remparts jusqu'aux femmes et aux enfants.
Qui d’entre vous voudrait rester parmi ces tristes âmes dont parle Dante,
plongées dans les limbes du doute et de l'indifférence, également odieuses à
Dieu et à ses ennemis? À Deo spiacenti ed a’ nemici sui.®
Plusieurs d’entre nos amis l’ont vu accourir au lendemain de la captivité du
Saint-Père dans nos comices de la Correspondance de Genève,$ où sa présence
au milieu de ces catholiques d'élite, venus de diverses nations, était pour tous
un appui et une joie. Les congrès catholiques d'Italie, les associations diverses
n'ont pas oublié sa puissante influence dans cette croisade pacifique de la
foi, de la science et des oeuvres. Il savait que l’action particulière languit et
que l’union des forces ne tarde pas à porter de grands fruits. Il comprit bien
vite, avec l'intuition de ses convictions chrétiennes, que le grand malheur de
notre temps, c’est le divorce opéré entre l’activité sociale et la foi catholique.
L'oeuvre des cercles ouvriers que Pie IX appelait l’armée de Dieu, ces germes
des corporations chrétiennes que son glorieux successeur Léon XIII bénit
dans ses immortelles encycliques, lui apparut comme une oeuvre capitale
des temps présents. Il étudiait les souffrances populaires dans les livres des
économistes, mais plus encore dans le contact chrétien avec les hommes de
travail ; sa parole leur était persuasive, et quand il dominait sa timide nature,
il parlait aux paysans et aux ouvriers avec des accents d’éloquence qui ne sont
pas oubliés. Nous nous souvenons tous de la part qu’il prit comme secrétaire