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LES INTER-TEXTES AUX FRONTIERES DELA PEINTURE;LA POETIQUE VISUELLE DE SIMON HANTAI

Dans ses études bien connues, A.C. Danto accuse Marcel Duchamp" dabus
de beauté artistique et de « dépouillement » de l’art par la philosophie, qui a
exclu «la beauté rétinienne » du domaine de l’art. D’après son récit, il s’est rendu
compte, en jouant aux échecs, que la présentation de « la beauté de la pensée »
peut ouvrir de nouvelles voies dans le domaine des arts plastiques, et cette
nouveauté a réellement abouti à la naissance du paradigme de l’art conceptuel.
Hantaï ne dément pas l’importance de la «spiritualité » dans l’art, mais il
revalorise ce que Duchamp avait mis entre parenthèses, à savoir l'importance
de la «beauté sensuelle » et du « plaisir rétinien » tout en insistant sur le fait que
«sensation » et «savoir », « beauté » et « vérité » - appréhendées depuis la position
spirituelle qui est la sienne — ne sont pas antagonistes'.

En 2007, lors d’un symposium consacré à Duchamp, l'historien de l’art Lóránd
Hegyi a utilisé une métaphore intéressante en parlant de l’activité de Duchamp.
Il a dit que Duchamp « avait éclairé le champ de l’art avec la lumière de l'esprit”. »

Reprenant les métaphores de la «lumière » et celle de « l’éclairement » (dont
Hantaï fait un usage fréquent dans les entretiens et les films autobiographiques
qui lui sont consacrés), il n’éteint pas ou ne souffle pas la lumière de l'esprit, mais
il crée des « étoilements » en déviant et multipliant les lumières. Dans ses toiles,
Hantaï ravive toujours plus de lumière à partir de différentes traditions de la
culture occidentale (la poésie, la philosophie, la théologie, l’histoire, la spiritualité
et la psychologie). Les pensées symbolisées par différentes couleurs, comme les
sons dans une symphonie, forment ensemble une harmonie de couleur rose. Il
démontre en même temps que ces sons, ces pensées, possèdent une « couche »
commune qui se manifeste à travers les méditations réalisées par des matériaux
tangibles, telles que la teinture et la toile. En dehors de cela, il démontre que ce
phénomène a toujours été présent dans les différents domaines de la «spiritualité
dans l’art » et de la pensée dans la culture occidentale. Pour les représentations
en arts plastiques, il n’est nécessaire de refuser ni la matière, ni l'aisthesis,
importantes dans la peinture, car — en filant la métaphore de Léränd Hegyi —
lorsque matière, âme, esprit « éclairent » ensemble, les propos de Georges Didi¬
Huberman, développés dans une étude de 2004 semblent entièrement pertinents
pour la peinture, en tout cas celle de Hantaï, même après les théories de fin de
l'art:

15 Arthur. C. Danto, op. cit., 1988., et The Abuse of beauty. Chicago, Open Court, 2003.

16 Sous la direction de Jülia Klaniczay, Marcel Duchamp Szimpozion. Ötperces elöadasok Marcel
Duchamp szellemeben. Budapest, Artpool, 2007.

77 Sous la direction de L. Zimmermann - Cécile Defaut, Georges Didi-Huberman, « L'image brûle ».
In Penser par les images (Autour des travaux de Didi-Huberman), Nantes, 2006. p. 51-52.

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