SOURCES DE LA CONTEMPLATION CHEZ THOMAS MERTON
a une publication de l’Expérience intérieure, je renvoie les intéressés à la préface
du livre, par William H. Shannon, qui nous fournit de précieux détails à ce sujet.)
L'intérêt particulier de l’Expérience intérieure vient du fait que, quoique écrite
en 1959, presque une dizaine d'années avant la mort de Merton, elle semble
cristalliser la pensée mûrie de l’auteur sur la contemplation et prendre ainsi une
place centrale au sein de son ceuvre. Qu’est-ce qui nous permet de le dire? Dune
part, aprés le dualisme de ses années de jeune moine, Merton fait preuve dans
ce livre d’une ouverture vers l’autre, d’un retour compassionnel vers le monde
qu'il avait sévèrement rejeté quelques années plus tôt, mais il témoigne aussi
d’une ouverture envers certains courants de pensée tels l’existentialisme ou
diverses traditions religieuses: dès la fin des années 50, Merton s'intéresse
notamment au bouddhisme zen, ce qui aboutira à un dialogue avec Daisetz
Teitaro Suzuki. D'autre part, le fait que le manuscrit qui servait de base à l'édition
intégrale de 2004 ne comportait que très peu de modifications par rapport à la
version rédigée en 1959, et qu'il s’agit surtout de modifications qui ne touchent
pas l'essentiel, plaide également pour le caractère définitif, accompli du livre.
D'autre part, selon une lettre de Merton à Czestaw Milosz, l'Expérience intérieure
a été écrite avec l’ambition de présenter ce sujet « de manière beaucoup plus
profonde, en abordant les liens qui unissent la contemplation chrétienne à la
tradition orientale et en démontrant que la contemplation ne se limite pas 4 un
domaine bien déterminé de la vie humaine mais l’embrasse dans toutes ses
dimensions”. »
En effet, l'avertissement préliminaire du livre souligne cette vision unificatrice:
« La pire chose qui puisse arriver à une personne qui est déjà divisée en une
douzaine de compartiments différents, c’est de circonscrire encore un autre
compartiment et de lui dire qu’il est plus important que tous les autres, et
que désormais elle doit s'appliquer spécialement à le maintenir séparé d'eux’. »
Notons que l’auteur ne s'exprime pas seulement contre cette division de la
personne, mais aussi contre une attitude qui donnerait la priorité à la contemplation
face aux autres domaines de la vie.
Le passage le plus frappant pour décrire cette unité entre les différents aspects
et actions de la vie est le suivant:
3 Lettre datée du 12 septembre 1959, v. la préface par William H. Shannon In Thomas Merton, The
Inner Experience. Notes on Contemplation. éd. cit.
4 "Thomas Merton, « L'expérience intérieure. Notes sur la contemplation ». In Chemins de Dialogue,
n°15, 2000, p. 17.