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STÉPHANE KALLA

des conditions multiples (tant manifestes gue discrétes) de son apparition. Or,
les conditions en guestion, de par leur nature intrinséguement perceptive, sont
en mouvement perpétuel, c’est pourquoi tel événement ne peut jamais se
reproduire ä l’identique. Deuxiemement, la re-presentation d’un objet-evenement
temporel par des actes de mémoire, n’est jamais isolée, bien au contraire, ladite
re-présentation s’effectue en relation constante avec un réseau de re-présentations
antérieures (passées) dont l’architecture est constamment modifiée en fonction
des rétentions et re-présentations nouvelles (présentes). Finalement, nous pouvons
dire que l’objet-événement-temporel est toujours un point de vue provisoire et
singulier sur le réseau potentiellement infini de nos impressions rétentionnellement
dévoilées et agencées.

La synthése mnésique

Francisco Varela, dans son article intitulé «Le présent spécieux », établit une
corrélation entre la dynamique du flux temporel immanent et l'hypothèse dite
de « la synchronisation neuronale », hypothèse selon laquelle « c’est la coïncidence
précise de la décharge des cellules qui procure son unité à l'expérience mentale
cognitive ». Il s'agit pour Varela d'expliquer scientifiquement l'émergence du flux
temporel immanent d’un point de vue naturaliste, en réduisant le phénomène
immanent de la liaison temporelle et continue de nos perceptions au « couplage
d’assemblées neuronales par synchronisation » : l’activité synchronisée d’assem¬
blées neuronales traitant chacune de propriétés spécifiques afférentes aux objets
pourrait résoudre l'énigme de la liaison perceptuelle et du flux temporel imma¬
nent. Cette thèse, d’abord défendue par Christof von der Malsburg au début des
années 80, puis par Andreas Engel et Wolf Singer qui la développèrent au fil d’un
certain nombre d'expériences, suppute que les objets représentés dans le cortex
visuel sont distinctement perçus grâce à des assemblées de neurones faisant feu
simultanément. Par exemple, imaginons la scène suivante : abandonnés sur un
banc public, par un individu trop distrait, deux objets disposés l’un à côté de
l’autre, un sac de sport et un parapluie. Chacun des deux objets sera représenté
par une vaste assemblée de neurones dans le cerveau. Chaque assemblée com¬
prendra des neurones capables de détecter différents attributs de chaque objet,
comme la couleur, le mouvement ou l'orientation de ses lignes et contours, etc.
Et c’est par la synchronisation de ces différents neurones codant pour ces diffé¬
rents attributs que serait obtenue l’image cohérente et unifiée du sac de sport.
Quant aux neurones codant les différents attributs du parapluie, ils feront éga¬
lement feu en synchronie pour fournir une image unifiée du parapluie mais de
façon décalée dans le temps par rapport à l’assemblée de neurones codant pour

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