présentation de ces derniers. Un projet d’axiomatisation des données
phénoménologiques élémentaires impliquerait par conséquent de “récupérer”
l'acte originel de la dynamique rétentionnel à travers la mise en place d’un
formalisme mathématique adéquat; or qui dit «formalisme» dit aussi
nécessairement « re-présentation », le projet de naturalisation de la phénoménologie
doit donc légitimer la possibilité de contourner (voire d'effacer) l'opposition très
claire établie par Husserl, entre «rétention » (présentation) d’une part, et
« ressouvenir » (re-présentation) d’autre part:
« La modification de la conscience, qui transforme un maintenant originaire
en un maintenant reproduit, est quelque chose de tout différent de la modi¬
fication qui transforme le maintenant, originaire ou reproduit, en un passé.
Cette dernière modification a le caractère d’un dégradé continu : de même
que le maintenant passe dans le passé, et encore dans le passé, par une gra¬
dation continue, de même la conscience intuitive du temps se transforme elle
aussi par degrés continus. Au contraire, il n’est pas question d’un passage
continu de la perception à l’imagination, de l'impression à la reproduction.
Cette dernière différence est discontinue. Aussi devons-nous dire: ce que
nous nommons conscience originaire, impression ou encore perception, c’est
un acte en dégradé continu. Chaque perception concrète implique tout un
continu de tels dégradés. Or la reproduction, la conscience qui imagine, exige
elle aussi exactement les mêmes dégradés, mais justement reproductivement
modifiés. Dans les deux cas, il appartient à l’essence des vécus de devoir être
étalés de telle sorte qu’il ne puisse jamais y avoir de phase ponctuelle isolée". s
Husserl désigne par «un acte en dégradé continu » le processus rétentionnel
inhérent à la perception concrète des objets-événements-temporels. L'action de
reproduire (ou de re-présenter) le « dégradé » d’une donation primaire n’est elle¬
même pas dénuée d'extension temporelle : toute re-présentation s'étale au travers
d’une rétention spécifique, d’un « dégradé continu» qui, se superposant au
« dégradé » de la donation originelle, ajoute à cette dernière un certain nombre
de modifications. Cet ajout continu de modifications se superposant aux
impressions primaires n’est autre qu’un attribut fondamental de la dynamique
rétentionnelle : celle-ci consiste en effet en un « dégradé » progressif au travers
duquel sont étalées les informations élémentaires dont procède la perception
spontanée des objets-événements-temporels. La re-présentation n'échappe donc
pas à cette loi phénoménologique, car elle est intrinsèquement structurée par
cette dynamique rétentionnelle, et par là même, n’est pas capable de coïncider
parfaitement avec la présentation des vécus purs. En effet, se re-présenter les