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STÉPHANE KALLA
Objets temporels immanents et modélisation

Lintuition est un concept qui préte souvent 4 confusion, notamment parce quil
renvoie traditionnellement a la sphére principalement subjective de notre expé¬
rience du réel. Or, dans « Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime
du temps », Husserl explique de façon très précise et détaillée les modalités de
la constitution des objets temporels au sein d’une intuition primordiale, et donc
hautement spécifique : celle de la « durée ». Mais qu'est-ce que la durée? Cette
interrogation nous le verrons, constitue le principal obstacle au projet d’une
«naturalisation de la phénoménologie ». En effet, le temps possède un statut très
particulier dans la phénoménologie husserlienne, il constitue à proprement
parler le mode au travers duquel se manifestent continûment les singularités
perceptuelles des objets et des événements du monde:

«Il est évident que la perception d’un objet temporel comporte elle-même de
la temporalité, que la perception d’une forme temporelle quelconque possède
elle-même une forme temporelle. Et si nous faisons abstraction de toutes les
transcendances, la perception conserve, dans tous ses constituants phéno¬
ménologiques, sa temporalité phénoménologique, qui appartient à son essence
irréductible. Puisque la temporalité objective se constitue chaque fois phé¬
noménologiquement et ne se tient là pour nous, sur le mode de l’apparition,
comme objectivité et moment d’une objectivité, que grâce à cette constitution,
une analyse phénoménologique du temps ne peut donc tirer au clair la consti¬
tution du temps sans prendre en considération la constitution des objets
temporels?. »

Un « objet » est dit « temporel » en ce que son étre dérive en partie de son
extension temporelle, ou durée:

« Par objets temporels, au sens spécial du terme, nous entendons des objets
qui ne sont pas seulement des unités dans le temps, mais contiennent aussi
en eux-mêmes l'extension temporelle. Quand un son résonne, mon appréhen¬
sion objectivante peut prendre pour objet le son qui dure et résonne là, et non
pourtant la durée du son ou le son dans sa durée. Celui-ci comme tel est un
objet temporel“. »

3 Edmund Husserl, Leçons pour une phénoménologie de la conscience intime du temps (1905). Paris,
Presses universitaires de France, 1996, p. 36.
1 Ibidem, p. 36

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