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ADRIANO OLIVA

Thomas répond:

« [...] ce type de contemplation est la fin de la vie humaine [...] Elle sera par¬
faite dans la vie future, quand nous le verrons face a face [1 Cor 13, 12]. Mais
a present la contemplation de la vérité divine ne nous est possible qu’impar¬
faitement, comme dans un miroir et en énigme [1 Cor 13, 12], de sorte qu'elle
est pour nous comme une amorce de la béatitude, qui commence ici-bas pour
se terminer dans le futur. C’est pourquoi le Philosophe, au livre X de l’Ethique,
fait consister la félicité ultime de l’homme dans la contemplation du suprême
intelligible. Mais puisque nous sommes conduits à la contemplation de Dieu
par les effets de son action, selon Romains I: ce qu’il y a d’invisible en Dieu
se laisse voir à l’intellect par ses œuvres [tâche qui revient à l’homme en tant
qu'homme], la contemplation des œuvres divines relève en second lieu, elle
aussi, de la vie contemplative, dans la mesure où c’est à partir d’elle que
l’homme est conduit à la connaissance de Dieu!°. »

Dans cette réponse, il faut remarquer que Thomas, en s'appuyant sur l'autorité
d’Aristote, prend ensemble la contemplation des païens et celle des chrétiens,
qui correspond à la troisième composante de la contemplation, la considération
des effets divins. En effet, pour lui, quant à l’acte de contemplation et quant à
son objet et à sa fin, la contemplation d’un homme païen et celle d’un homme
baptisé sont identiques. En deux choses cependant elles different: l’intellect du
païen, dans sa contemplation des effets divins dans le monde, est illuminé
seulement par sa lumière naturelle, alors que l’intellect du baptisé est illuminé
par la lumière surnaturelle de la foi et par les contenus de la révélation. En outre,
le païen est mu à contempler par son désir naturel et par un amour naturel de
soi, alors que le baptisé est mu immédiatement par l'amour de charité, qui porte
d’abord sur Dieu, tout en aimant aussi soi-même”. L'amour qui meut l’homme
à contempler sera aussi l'achèvement de la contemplation parfaite : « Puisque

» IF-IIe, q. 180, a. 4, resp. (ed. Leon., t. 10, p. 427-428; les italiques sont dans l’edition ; les
soulignements sont de nous).

2 V.Q. disp. de uirtutibus, a. 5, ad 8: «Dicendum quod ad felicitatem quedam preexiguntur sicut
dispositiones, sicuti actus uirtutum moralium, per quos remouentur impedimenta felicitatis, scilicet
inquietudo mentis a passionibus et ab exterioribus perturbationibus. - Aliquis autem actus est uirtutis,
qui est essentialiter ipsa felicitas quando est completus, scilicet actus rationis uel intellectus. Nam
felicitas contemplatiua nichil est aliud quam perfecta contemplatio summe ueritatis ; felicitas autem
actiua est actus prudentie, quo homo et se et alios gubernat. - Aliquid autem est in felicitate sicut
perfectiuum felicitatis, scilicet delectatio, que perficit felicitatem sicut decor iuuentutem, ut dicitur
in X Ethicorum. Et hoc pertinet ad uoluntatem. Et in ordine ad hoc perficit uoluntatem caritas, si
loquamur de felicitate celesti, que sanctis repromittitur. Si autem loquamur de felicitate contemplatiua
de qua philosophi tractauerunt, ad huiusmodi delectationem uoluntas naturali desiderio ordinatur »
(d’après le texte provisoire de la Commission Léonine, établi par É. Deronne; les italiques sont de
nous; V. éd. Marietti, 1965, p. 721); pour la référence à Aristote: Aristoteles, Ethic. Nic., Lib. X,

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