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de liqueur et les liquoreux*. Si nous connaissons beaucoup mieux l’histoire des
vignobles qui leur sont consacrés, y compris pour les pays étrangers, celle de
leur consommation et de leur commerce reste à bâtir malgré quelques ouvrages
importants, notamment /'Histoire sociale et culturelle du vin de Gilbert Garrier’.
C’est pourquoi des rencontres comme celle qui nous réunit au pays du tokay sont
d’un grand intérêt.

Certes, à partir des XII-XIII siècles, nous trouvons des renseignements sur les
vignobles, la production des vins et leur consommation : par exemple, des re¬
marques littéraires ou des fragments de livres de comptes, parfois des notations
dans des journaux privés, des livres de raison ou des correspondances. Mais, au
total, les données restent lacunaires et il faut à chaque fois que l’on aborde ces
questions mener des recherches très approfondies. Elles ont pu être réalisées pour
plusieurs vignobles‘, de manière au demeurant fort inégale, mais le commerce et
la consommation des vins nous restent très largement inconnus. C’est ainsi, qu'en
dehors de quelques grandes lignes, nous ne pouvons pas retracer l’évolution des
goûts viticoles des Parisiens de la fin du Moyen Age 4 la fin du XIX siécle, alors
qu'il s’agit d’un considérable marché de consommation.

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Or, l’étude des inventaires après décès’ parisiens montre que nombreuses sont les
caves où les notaires trouvent du vin*, ce qu'ont déjà souligné Yves Durand”, Ni¬

vins mutés mais l'addition d’alcool éthylique se fait avant la fermentation. On parle de vins liquoreux
lorsque le ratio sucres résiduels/alcool de vin excède les 45 grammes par litre.

* On partira d'Alain Huetz de Lemps, « La diversité des vins liquoreux », dans Os vinhos licorosos e a historia,
ouvr.coll., Funchal, Centro de Historia del Atlantico, 1998, p. 19-47. — Voir également l'ouvrage très
réussi d’Yves-Marie Bercé, Les secrets du vin, Paris, Librairie Vuibert, 2018 ; on y apprend notamment ce
qu il faut savoir sur ces différents vins : par exemple, on trouve de la page 45 à la page 60 « Les précieux
vins de Malvoisie ».

5 Paris, Bordas, 1995.

5 Par exemple, nous avons l'ouvrage très réussi de Benoît Musset, Vignobles de Champagne ef vins mousseux :
Histoire d'un mariage de raison 1650-1830, Paris, Fayard, 2008.

7 Maurice Garden, « Les inventaires après décès : source globale de l’histoire sociale lyonnaise ou juxtapo¬
sition de monographies familiales ? », Cahiers d'Histoire, t. 12, 1967, p. 157-173.

# Certes, les inventaires ne concernent qu’une minorité des défunts parisiens et les caves ne se trouvent que
dans une minorité d’inventaires après décès, essentiellement à partir du dernier tiers du XVII siècle ;
elles n'en constituent pas moins une possibilité pour étudier la consommation viticole que l’on ne
trouve pas forcément ailleurs. Ainsi, à Bordeaux et en Bordelais les caves sont rares même à la fin du
XVIIT: siècle ; lorsque l’on trouve du vin dans un inventaire, il est conservé essentiellement dans des
chais et dans des barriques : voir Stéphanie Lachaud-Martin, « Chais et cuviers en Sauternais aux XVII°
et XVIII siécles » , dans Marguerite Figeac-Monthus et Stéphanie Lachaud-Martin (dir.) , Patrimoines
viticoles : les lieux et les objets de la vigne et du vin, de l'Antiquité à nos jours, Bordeaux, Fédération historique
du Sud-Ouest, 2015, p. 121-133 ; Jean-Pierre Poussou, « De la difficulté rencontrée pour connaître les
vins que buvaient les Bordelais au XVIII: siècle », à paraître dans les Actes du Congrès de la Federation
historique du Sud-Ouest tenu à Bazas en octobre 2019.

* Les fermiers généraux au XVIIT siècle, Paris, PUF, 1971, p. 522-523.

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