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chette tenait au fait que le rendement était plus faible au fur et à mesure que l’on
s’éloignait de Paris, autour de 20 hectolitres par hectare, car le fumier se faisait
plus rare dans les vignes'#. Les rendements du Sauternais apparaissent plus élevés
que ceux relevés par Henri Enjalbert dans le vignoble de Saint-Émilion pour la se¬
conde moitié du XVIII siècle!”. Ils étaient également plus élevés que ceux observés
en Bourgogne à la même époque. À Beaune, par exemple, on récoltait 16 hecto¬
litres par hectare entre 1789 et 1812 selon Loïc Abric?, ce qui confirme les esti¬
mations antérieures de Marcel Lachiver, qui étaient de 20 hectolitres par hectare
en Bourgogne en 1788, tous vins confondus’. Le Sauternais semble alors se situer
dans une fourchette haute de productivité viticole, mais légèrement inférieure à
celle du vignoble de Reims, où les rendements se situaient autour de 30 hectolitres
par hectare, et bien plus faible que celle du vignoble d'Épernay, évaluée autour de
40 hectolitres par hectare”.

Il serait intéressant de comparer ces résultats de 1793 avec des époques anté¬
rieures. La seule possibilité qui nous est offerte pour mener à bien cette estimation
est l’utilisation des rôles de vingtieme et de capitation des années 1754-1756”. Ces
sources indiquaient la production de plusieurs domaines nobles, leur localisation
et leur superficie. En regroupant les domaines par paroisses, on peut calculer les
rendements en hectolitres par hectare pour chaque paroisse considérée, tout en sa¬
chant que ce chiffre ne sera valable que pour le vignoble aristocratique et seulement
pour les récoltes 1754-1756. Toutefois, en raison de l’emprise nobiliaire sur la terre
en Sauternais, ces résultats conservent leur pertinence. Deux constats s’imposent
alors. D’une part, on remarque la variabilité des rendements en fonction des do¬
maines. Ainsi, le Sieur d’Armajan possédait un domaine a Barsac qui ne produisit
que 12,23 hectolitres par hectare en 1754-1756, alors que celui de Preignac offrit,
la méme année, 34,24 hectolitres par hectare. D’autre part, trois groupes tendent
à se distinguer. Dans un premier temps, Barsac offrait de faibles rendements vi¬
ticoles, avec seulement 13,13 hectolitres par hectare. Ensuite, Fargues, Bommes
et Sauternes se situaient autour de 20 hectolitres par hectare et faisaient figure de
moyenne d'ensemble du vignoble. Enfin, Preignac apparaissait comme la localité
la plus productive, avec des rendements moyens de 27,88 hectolitres par hectare.

18 Marcel Lachiver Vins, vignes et vignerons en région parisienne, op. cit., p. 132-140.

% Henri Enjalbert, Les Grands vins de Saint-Émilion, Pomerol, Fronsac, Paris, Bardi, 1983, p- 291. Dans la
paroisse de Saint-Etienne, les 250 journaux de vigne produisaient en moyenne 100 tonneaux de vin, soit
80,32 hectares donnant 900 hectolitres, ce qui revenait à un rendement de 11,21 hectolitres à l’hectare.
Ils étaient également plus élevés que ceux observés en Bourgogne à la même époque. Ces chiffres sont
tirés du mémoire de Jean Loubères de 1761, concernant la Juridiction de Saint-Émilion. Il s’agit d’une
étude de la vie agricole des huit paroisses rurales de la Juridiction.

2 Loïc Abric, Les grands vins de Bourgogne de 1750 à 1870. Production, commerce, clientèle, Dijon, Éditions
de l’Armagon, 2008, p. 61-63. Plus généralement, l’auteur admet une fourchette de rendement viticole
des vins de Bourgogne entre 15 et 20 hectolitres par hectare, avec une moyenne basse de 15 hectolitres
par hectare pour les vins fins.

# Marcel Lachiver, Par les champs et par les vignes, Paris, Fayard, 1998.

2 Benoît Musset Vignobles de Champagne et vins mousseux, 1650-1830. Histoire d’un mariage de raison, Paris,
Fayard, 2008, p. 211.

3% Arch. dép. Gironde, C 3018 et C 3019, 1754-1756.

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