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KATA GYURIS

sur un plan métaphysique non seulement des termites mais tout, y compris l’acte
de violence de Fintan, ce qui rattache encore une fois le corps à l'esprit. Au lieu
de les séparer, l’exclamation de Bony nous rappelle que l’esprit est contenu dans
la matière. Le Clézio parle de ce méme probléme dans L’Africain également, en
soulignant la sauvagerie sans motivation et l’étonnement des gens pour qui des
termites étaient des dieux créateurs. Il dit que «la gratuité de cette violence?* »
n'avait aucun sens pour eux et peut-être pour lui [Le Clézio] aussi.

Slavoj Zizek appelle une telle apparition de la violence subjective puisqu'elle
est transparente et reste sans explication. Il cite la notion de Walter Benjamin,
«violence pure ou divine » pour décrire cette violence qui n’a aucune motivation
mais qui — selon Zizek — surgit précisément à cause de la violence objective qui
infiltre le monde. La violence objective est surtout le produit des mécanismes
opprimants de la société capitaliste dont la manifestation la plus éclatante est la
colonisation. Ainsi, non seulement ce dernier type de violence est dangereux,
mais encore a le potentiel de provoquer la violence subjective 4 long terme. Zizek
rappelle que la violence subjective et visible n’est pas vraiment la conséquence
des actions des individus mais plutôt le résultat de la présence étouffante de la
violence objective. Le désir incompréhensible de Fintan et du jeune Le Clézio de
détruire les termitières peut être ainsi interprété comme une manifestation de
la violence subjective, une révolte contre le colonialisme, animées précisément
par la force oppressive et secrète de ce même phénomène”.

Cependant, cela n’explique pas l’autre conception de la violence que l’on peut
trouver dans L'Africain. Ici, la violence surgit entièrement comme un attribut
abstrait et métaphysique. On la rencontre dans les contes d'enfant qui sont soit
racontés au jeune Le Clézio, soit inventés par lui et ses amis. En dehors d’être
profondément incorporée en Afrique, la violence n’a aucune connotation négative:
la violence est honnête et ouverte. Elle est plutôt décrite comme une puissance
omniprésente et omnipotente qui surgit dans tout ce qui est d’origine africaine:
la nature et l’homme également.

«Je me souviens de la violence. Non pas une violence secrète, hypocrite,
terrorisante comme celle que connaissent tous les enfants qui naissent au
milieu d’une guerre [...] Cette violence-là n’était pas vraiment physique. Elle
était sourde et cachée comme une maladie. [...] Ogoja me donnait une autre
violence, ouverte, réelle, qui faisait vibrer mon corps. C'était visible dans
chaque détail de la vie et de la nature environnante’. »

4 LAfricain, p. 32.
25 Slavoj Zizek, Violence. New York, Picador, 2008, p. 9-15.
26 LAfricain, p. 19-20.

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