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« CETTE CONNAISSANCE CHARNELLE» - LAFRIQUE INFINIE ET FEROCE DE J. M. G. LE CLEZIO

sa peau craquelée, ternie, un peu grise, tout cela me semble étrange, et en même
temps vrai'8.» Ce qui est intéressant, c’est qu'au lieu de la pitié ou du dégoût, il
«ressentait [...] de l'amour et de l’intérêt!?.» Cela signifie qu'en Afrique même
un corps vieux et hideux ne vaut pas moins qu’un corps sain et jeune. Cette
distinction est importante parce que jusqu'ici, l'enfant Le Clézio n'avait rencontré
que des corps féminins intactes, « exempts de la maladie de l’âge”.» Ainsi, le
voyage en Afrique lui donne une chance de connaître une autre conception du
corps qui paraît plus honnête et porte des associations différentes.

« La violence des sensations »?! — La violence pure de l’Afrique

La disparité entre colonisateur et colonisé se montre également dans la violence
qui surgit non seulement dans le corps mais aussi dans l'esprit. Dans Onitsha, à
part la violence des colonisateurs, nous avons également la violence incontrôlée
de Fintan, l’adolescent qui se bat contre tout sans réfléchir, une violence qui
émerge, tout de même, d’une profondeur inconnue :

« Au bout de la plaine, il y avait une sorte de clairière de terre rouge. [...] C'était
la ville des termites. [...] Il y avait un silence étrange sur cette ville, et sans
savoir pourquoi, Fintan avait pris un bâton et avait commencé à frapper les
termitiéres. [...] Fintan avait attaqué les termitières l’une après l’autre, avec
sauvagerie. Il ne savait plus trop ce qu’il faisait. C'était pour oublier, peut-être,
pour détruire. Pour réduire en poudre sa propre image”. »

La destruction des termitiéres est 4 la fois tres physique, comme un rite de
passage pour Fintan, et en méme temps trés symbolique. Dans un premier temps,
cette scene reconstitue les enjeux coloniaux où tout simplement le plus grand
anéantit le plus petit par force pure. Dans un deuxième temps, elle donne une
bonne image de l’abjection de Fintan, de sa réjection d’une partie de lui-même
(peut-être sa partie coloniale), ce qui s'exprime par cet acte sans motivation.

Cette violence contre les termites est arrétée par l’ami de Fintan, Bony, qui
crie « C’est dieu?*!», ce qui ne fait aucun sens pour Fintan qui considére ces
insectes comme des étres inférieurs. En disant que Dieu est partout, Bony éléve

18 Idem, p. 15.

1 Idem, p. 15.

20 Idem, p. 15.

2° Idem, p. 16.

2 Onitsha, p. 70-71.
3 Onitsha, p. 71.

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