OCR Output

MARIANN KÖRMENDY

aprés guelgues heures descalade mais cette indication nest pas identifiable faute
de précision et de repére. Pendant les premiers jours, nous avons encore guelgues
points de reperes avec l’indication de la nuit et du matin mais ces indices naturels
disparaissent très rapidement et les moments de sommeil se détachent des nuits.

Voilà les indications que l’on trouve dans le passage qui suit les deux premiers
jours, présentées dans l’ordre de leur occurrence (point initial: le 2° jour): «les
jours qui suivirent » (p.21), « dans quelques heures peut-être », « demain ou
apres-demain au plus tard » (les 2 derniers: style indirect libre) «à tout moment »
(22), «le troisième jour » (22). Au niveau du choix des temps verbaux, la
présentation des événements semble respecter l’ordre chronologique, les
descriptions, les monologues internes et les commentaires mis à part, le récit est
au passé simple qui est censé assurer la linéarité, mais cette linéarité est rapidement
compromise par les compléments de temps.

Les passages à l’intérieur des chapitres sont séparés d’astérisques, la partie
où nous avons repéré les indications temporelles évoquées ci-dessus est le
deuxième passage ainsi délimité.

Ces phrases sont suivies des hallucinations de Robinson, et paradoxalement,
des marqueurs d'intégration temporelle — jusqu'ici complètement absents —
apparaissent dans le texte : d'abord, puis, enfin marquent les étapes de la dérive
qui incite Robinson à faire un effort pour se reprendre en main, entreprise vouée
à l'échec pour le moment. La succession des indicateurs temporels comme ce
jour-là, il lui fallut plusieurs jours, dès le lendemain (mais le lendemain de quoi ?)
marquent l’incohérence du temps, de son temps. Dans la partie analysée, on
trouve plusieurs ce jour-la et un jour, indications indéterminées et ininterprétables.
Force est de constater que c’est un univers dans lequel les « aujourd’hui» ne
découlent pas des «hier » et ils n’ont pas de «lendemain » : il ne reste que des
jours, des entités qui ne s'unissent jamais pour créer le flux du temps.

Dans le chapitre II, la situation empire!": ce jour-là, un matin, bientôt, quelques
heures plus tard (on ne sait pas par rapport à quel moment) — autant d'indicateurs
qui, au lieu de s’enchaîner, indiquent des moments sans relations entre eux.
Aucune anaphore ne reprend un moment déjà évoqué, aucune référence n’est
faite aux événements antérieurs. Les événements à venir, eux, sont présents mais
non datables, ils sont évoqués sous forme de monologues internes, au style indirect
libre, sans pouvoir prendre place sur un axe temporel, tout au plus sont-ils mis
en relation avec un futur plus ou moins éloigné (par exemple avec les marqueurs
bientôt ou plus tard).

1 Au cours du roman, cette perte de temps se transformera, nous la considérons comme « problème »
jusqu’au moment où elle deviendra un des éléments fondateurs de la nouvelle vie de Robinson.

s 216 "