SOURCES DE LA CONTEMPLATION CHEZ THOMAS MERTON
spirituelle transcendante — dans l’union quasi-experientielle de ses membres
avec Dieu, au-delà des sens et au-dela de l’extase”. »
En plus de la simplicité comme repére dans la vie spirituelle authentique, la
revendication récurrente de l’enracinement dans la réalité peut être relevée
comme trait distinctif de la véritable contemplation et d’une attitude que Merton
considère comme « sacrée ». Il en souligne l'importance primordiale à maintes
reprises, comme dans la citation suivante : « Le contemplatif ne se cherche plus
ni dans l’action, ni dans la prière, mais il est arrivé à une sorte de sainte indifférence,
s’abandonne à Dieu et ne cherche qu’à rester en contact avec les réalités du
moment présent*®, »
Ailleurs, on lit: «l’homme de la foi s’abandonne à la volonté divine: non
comme à une puissance arbitraire et magique dont les décrets doivent être
déchiffrés d’après des codes secrets, mais comme à l'écoulement de la réalité et
de la vie même. L’attitude sacrée est donc une attitude de respect profond et
fondamental du réel quelle que soit la forme nouvelle dans laquelle il se
présente?! » C’est une attitude « qui ne recule pas devant notre propre vide
intérieur, mais elle y pénètre plutôt avec crainte et respect, et avec la conscience
du mystère”. »
Toujours à propos de la réalité et de cette disposition de l'esprit à faire face à
tout tel qu’il est, même à son propre « vide », Merton avertit son lecteur au tout
début de son livre qu’il ne veut pas le tromper en lui promettant une paix intérieure
et une joie à portée de main, dès que celui-ci franchira le pas de la vie contemplative.
Au contraire: «c’est un chemin qui n’en est pas un, et celui qui l’emprunte n’y
trouve rien. »
C'est sur ses bases qu’il présente la première loi essentielle de la contemplation :
ne pas s'asseoir avec l'intention de se mettre à résoudre ses difficultés, mais de
les supporter jusqu’à ce que la vie ne les résolve ou qu’elles ne se résolvent d’une
manière ou d’autre.
29 Idem, « L'expérience intérieure. Notes sur la contemplation ». In Chemins de Dialogue, n°15, 2000,
p. 43. (C'est nous qui soulignons.)
30 Idem, The Inner Experience. Notes on Contemplation. Ed. cit., p. 65: « [The masked contemplative]
no longer seeks himself in action or in prayer, and he has achieved a kind of holy indifference,
abandoning himself to the will of God and seeking only to keep in touch with the realities of the
present moment.» Une remarque s’impose: sous le terme d’indifférence il ne faut surtout pas
comprendre une sorte d’insensibilité froide ; lindifférence est employée depuis Saint Ignace de Loyola
pour exprimer l’aptitude de l’esprit ä tout envisager avec la méme liberté intérieure.
31 Idem, « Lexperience interieure. Notes sur la contemplation ». In Chemins de Dialogue, n°15, 2000,
p. 74.
32 Ibidem, p. 71.
3 Idem, The Inner Experience. Notes on Contemplation. Ed. cit., p. 1: « [...] the way of contemplation
is not even a way and if one follows it, what he finds is nothing. »