LE TEMPS COMME FORME DE LA CONTEMPLATION - PERSPECTIVES PHENOMENOLOGIQUES
ce qui est passé, la position de l’objet-événement-temporel qui s'y rapporte est
absolue :
«Mais alors, comment - à l'encontre du phénomène du changement continu
de la conscience du temps - la conscience du temps objectif, et tout d’abord
de la situation et de l'extension temporelle identiques, a-t-elle lieu ? La réponse
est la suivante : grâce au fait qu’à l'encontre du flux du repoussement tempo¬
rel, du flux des modifications de la conscience, l’objet, qui apparaît comme
repoussé, demeure précisément maintenu par aperception dans une identité
absolue, et ce avec la thèse, éprouvée dans l'instant présent, qui le pose comme
ceci”. [...] Quand le phénomène tombe dans le passé, le maintenant recoit le
caractère de maintenant-passé, mais il demeure le même maintenant, à ceci
près que, par rapport au maintenant à chaque fois actuel et temporellement
nouveau, il se tient là comme passé”. »
Imaginons que nous disposions d’une « cartographie » rétentionnelle, et que
nous puissions bien identifier les multiples connexions de l’objet-événement¬
temporel avec son «environnement » rétentionnel d’abord le plus immédiat, et
ensuite le plus éloigné, nous pourrions appréhender aisément le caractère absolu
de sa position. Et c’est la retombée de l’objet-événement-temporel dans le passé
qui lui confère une position absolue, en effet, l’environnement (ou réseau)
rétentionnel duquel émergea ledit événement étant désormais virtuellement figé
par une re-présentation plus ou moins confuse (un « ressouvenir ») qui le maintient
a l’ecart du present, l’événement par rapport a son environnement occupe donc,
en apparence, une position définitive, irréductible, et absolue (un peu comme un
corps photographié dans un certain contexte et dont les relations avec son
environnement immédiat semblent à jamais figées). Nous disons « en apparence »,
car une révision dudit objet-événement-temporel est toujours possible, en effet,
par des actes de mémoire nous pouvons indéfiniment re-présenter l'événement
et le repositionner par rapport aux objets-événements-temporels les plus récents,
réajustant donc indéfiniment sa position par rapport à son contexte d'apparition
initial. Finalement, penser, se re-présenter la spontanéité perceptive par des
processus d’objectivation immanente, c’est réviser en permanence nos vécus,
plus exactement une partie de nos vécus. Quelles sont les conséquences
potentiellement dérivées de cette assertion ? Premièrement, à partir de cette
assertion nous pouvons établir que nul événement ne peut être de facto dissocié
% Francisco Varela, « Le présent spécieux : une neurophénoménologie de la conscience du temps ».
In Naturaliser la Phénoménologie, Essais sur la phénoménologie contemporaine et les sciences
cognitives. Paris, CNRS Éditions, 2002, p. 345.