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LE TEMPS COMME FORME DE LA CONTEMPLATION - PERSPECTIVES PHENOMENOLOGIQUES

rétroactivement, par un acte de mémoire, re-présenté, isolé par abstraction et
analysé en fonction de desseins propres 4 chaque individu. Mais ce nouveau
regard jeté sur les rétentions modifie plus ou moins ces derniéres, qui ne
réapparaitront jamais plus sous le mode authentique de la « donation originaire ».
Ainsi l’acte de la re-présentation est un point de vue constamment renouvelé sur
des rétentions originelles ainsi que sur des re-présentations plus anciennes et
conservées par la mémoire sous la forme d’un réseau informatif (dont nous
essaierons de dégager les principales caractéristiques). On passe donc toujours
d’un plan a un autre en fonction du niveau d’articulation entre rétention et
ressouvenir, entre présentation et re-présentation. La distinction entre le souvenir
primaire (rétention) et le souvenir secondaire (ressouvenir) est absolument nodale
quant à la description de la nature du temps, en effet l’articulation des actes de
rétention et des actes de mémoire détermine tout étre comme étre temporel, et
manifeste que la mémoire n'est rien de « psychologique », qu’elle n’est en rien
une simple reconstruction après coup des données perceptives, mais qu’elle est
au contraire le lieu où tout être se constitue. Néanmoins, cette dernière assertion
est remise en cause, ou tout du moins questionnée par un courant de pensée qui,
s'inspirant de certains acquis des sciences cognitives, entreprend de donner à la
phénoménologie husserlienne un tournant naturaliste, en essayant notamment
de rendre compte de l'expérience phénoménale à partir d’une description de
l'activité cérébrale. Nous nous intéresserons en particulier au travail de Francisco
Varela et a son article intitulé « Le présent spécieux : une neurophénoménologie
de la conscience du temps »? qui est une illustration précise de ce projet de
naturalisation de la phénoménologie, projet dont nous dresserons une ébauche
de critique. Enfin, nous défendrons la représentation husserlienne d’un flux
temporel absolu, en expliquant comment et pourquoi les tentatives de modélisation
du phénomène temporel ne peuvent aboutir qu’à des résultats très relatifs, en
particulier à cause de ce fait troublant que pour tout acte de représentation (et
donc de modélisation, notamment conceptuelle), le temps de la rétention semble
irrémédiablement perdu, c’est pourquoi le projet de ressusciter cette temporalité
« perdue » vers lequel tend la systématisation des données perceptives, engendre
(comme nous le verrons) un réseau de connaissances infini, par essence inachevé
car en perpétuelle mutation.

? Francisco Varela, « Le présent spécieux : une neurophénoménologie de la conscience du temps ».

In Naturaliser la Phénoménologie, Essais sur la phénoménologie contemporaine et les sciences
cognitives, Chapitre 8, Paris, CNRS Éditions, 2002, pp. 341-397.

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