du terme. Pour Hegel, on s’en souviendra, le symbole désigne le moment oriental
de l’art et de la religion, lorsque le contenu recherche une forme extérieure dans
la nature, sans avoir encore produit sa propre réalité (l’effectivité). Aussi le symbole
est-il toujours affecté chez Hegel d’un coefficient négatif, il demeure incertain et
flottant, car trop ouvert et polymorphe. L'unité du spirituel et du sensible n’est
pas accomplie sous la forme symbolique de l’art, contrairement à la figure
anthropomorphe de la statuaire grecque classique qui présente de manière
adéquate le dieu sous forme humaine, soit l’esprit dans sa propre réalité sensible,
celle de son corps. Le lion, estime en revanche Hegel, peut-être le symbole de la
force, mais aussi du courage, de l’orgueil etc. Cette indécision, ce flottement de
sens sont en revanche essentiels au romantisme qui recherche plus la polysémie
que l’univocité synthétique. Novalis, s'inspirant des termes allemands, note que
le symbole (das Sinn-Bild) est une image du sens, une image par conséquent
offerte à l'interprétation: or si le contenu se connaît, le sens lui s’interprète
infiniment. Novalis parle ailleurs d’une symbolistique comme d’un mouvement
de représentation infinie. « Tout peut être symbole d'autre chose, note-t-il dans
son Brouillon général". » Cette illimitation trouve chez lui à se déposer dans
des objets mobiles et dans des formes ouvertes, travaillées par le devenir, la
mutation et la métamorphose permanente des figures. Si le conte magique est
la forme suprême et peut-être ultime de ce qu’il appelle « poésie de l'infini », c’est
très certainement en raison de sa propension au mélange incessant des éléments.
«Dans un conte authentique, note Novalis, tout doit être merveilleux, mystérieux
et sans connexion — tout s’anime. Chaque chose s’anime d’une manière différente.
La nature entière doit être merveilleusement mêlée au monde entier des esprits!*. »
Or ce mélange infini n’est pas une identité parfaite : il évoque une forme en
devenir. Et c’est le deuxième aspect de la poétique de l’infini de Novalis que je
voudrais évoquer pour finir ce parcours dans l’infini-fini.
J'ai rappelé en débutant la critique romantique du concept d'imitation de la
nature, la mimesis. En vérité, le premier romantisme — et Novalis en est sans
doute le plus éminent représentant à cet égard — ne renonce pas a la mimesis. I
la repense radicalement et la transforme: la grande question de l’art étant dès
lors non pas d’imiter les apparences (la nature naturée) mais le procès de la vie,
le devenir même (la nature naturante). Or ce projet, inspiré de Spinoza dans son
Éthique, suppose une sorte de décloisonnement de la forme qui n’est plus un tout
parfait et délimité pour le romantisme, mais une réalité en devenir, positivement