CONTEMPLER LINFINI : LES MÉDITATIONS RELIGIEUSES DE FRANGOIS II RÁKÓCZI
la guerre et les négociations de son mieux, toute décision venait de la Providence.
II nétait pas plus maitre du sort du pays que celui du sien propre. C’est encore
la puissance divine qui devra distinguer ce qui était bien ou mal dans ses actes
et ses finalités inspirées par l’esprit humain. En toute humilité, il définit le but
de son ouvrage par des paroles bibliques : tout est destiné pour montrer son néant
et la puissance de Dieu qui est « un Père tendre et moi, un enfant prodigue ». En
parlant des fautes éventuellement commises, il exprime sa conviction que ses
intentions étaient pures, même si les résultats pouvaient les contredire:
« Rechercherai-je enfin dans la Postérité une mémoire et un nom immortelle,
qui est l’Idole des princes mondains ? Vous seul savez que ces abominables
motifs ne sont pas les miens. C’est pourquoi, prenant pour guide la vérité
toute nue, j'ose, O Éternelle Vérité ! Vous dédier cet Ouvrage’. »
C’est ce vocabulaire sacré qu’il utilise partout avec des citations, plus ou moins
exactes, puisées dans les deux Testaments, en y ajoutant tous les termes techniques
nécessaires pour la description du déroulement de la guerre. Il se réfère tantôt
à l'Ancien Testament tantôt aux Évangiles sans se soucier des querelles et débats
théologiques que cela peut susciter (et que sa conception trop personnelle avait
en fait suscités plus tard) à propos de ses écrits religieux. Il mêle également les
citations bibliques ou les expressions d'inspiration bibliques avec les critiques
sévères des fautes de tous les participants de la lutte d'indépendance, y compris
lui-même et ses généraux. Pour ne citer que quelques exemples, voici un verset
biblique qui est comme un motif récurrent du récit: «J'étais aveugle et je
conduisais des aveugles’®. » Ailleurs, il constate amèrement que le comportement
de ses soldats, recrutés dans toutes les couches de la société était condamnable
et qu'ils n’ont jamais pu constituer une armée régulière. Le souvenir de la
débandade continuelle (en cas de victoire aussi bien qu'après les défaites) le hante
sans cesse : « Celui qu'on nommoit Caporal et Sergent, était camarade du Soldat
et ne savoit prendre aucune autorité sur lui; ils étoient du même Village, ils se
débandoient ensemble pour cultiver leurs champs et leurs vignobles, et pour
faire la récolte!!. » Ailleurs, il emploie des expressions plus crues encore: «[...]
il étoit impossible d'empêcher les Troupes de se débander après quelque action ;
si elle étoit avantageuse, ils retournoient chez eux pour emporter le butin, et si
elle étoit malheureuse, ils faisaient de même pour consoler leurs familles!?. »
° Mémoires du prince Francois I Rékôczi sur la guerre de la Hongrie. Budapest, Akadémiai Kiadé, p.
17.
10 Ibidem, p. 17.
1! Ibidem, p. 78.
2 Ibidem, p.76.