que nous observons par la speculation, que nous admirons »!°. Dans ces deux
cas, l’imagination se confond visiblement avec la sensibilite. Le troisieme degre
de la contemplation consiste a s’elever du sensible à l’intelligible à travers les
similitudes entre le naturel et le surnaturel et à travers les symboles qui se fondent
sur ces similitudes. Le quatrième degré est celui où la raison, après s'être détachée
du sensible, contemple uniquement les formes intelligibles. Le cinquième degré
s’accomplit déjà par l'intelligence et se fonde sur la révélation divine; le sixième
degré correspond à l'achèvement de la contemplation, à savoir à l'union avec le
divin.
Dans ce processus, ce sont le deuxième et le troisième degré qui nous importent
le plus, parce qu'ils révèlent Le rôle de l'imagination dans la contemplation. Comme
chez les Grecs, la contemplation part de la nature sensible. Cette démarche
explique l'importance de l'imagination qui signifie, dans ce cas-là, la sensibilité
(la faculté des images). Au troisième degré, où il s’agit de quitter l’ordre du sensible,
l’imagination fonctionne sous la direction de la raison. L’élévation du sensible à
l'intelligible s'effectue grâce à la similitude entre les choses naturelles et les êtres
surnaturels : l'imagination rend présentes les choses sensibles et la raison y
découvre des symboles, c’est-à-dire des traces du surnaturel au sein du naturel.
Cette troisième forme de la contemplation s'effectue dans la raison selon
l'imagination et définit précisément le rôle de l’imagination dans cet acte.
Les traits caractéristiques de la contemplation pré-moderne sont donc les
suivants: elle assure l'élévation du sensible à l’intelligible, elle se fonde sur le
fonctionnement simultané de la sensibilité, de l'imagination et de la raison, elle
aboutit dans l’intellection qui correspond à la saisie de l’Un, à la vision de Dieu
et à l’unio mystica, et, enfin, elle s'achève par l'atteinte du bonheur suprême. Il
est nécessaire de souligner aussi que le passage du naturel au surnaturel s'effectue
par la contemplation de l’ordre du monde et par la reconnaissance de la similitude
entre la nature sensible et la nature divine.
Revenons maintenant à la contemplation pascalienne. Vincent Carraud a fait
une analyse approfondie du fragment 199 des Pensées du point de vue de la
contemplation en concluant que la démarche intellectuelle mise en scène dans
ce fragment doit être qualifiée d’anti-contemplation. Pascal, écrit Vincent Car¬
raud, «opère la destruction du concept de contemplation, tel que la tradition