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de Langon dans le sud du Bordelais sont de plus en plus mentionnés a partir des
années 1750-1760 dans les caves et les achats de l’aristocratie. Aux cötes des vins
de Sauternes, on retrouve ceux de Barsac ou de Sainte-Croix-du-Mont. Dans les
années 1770, le comte d’Artois fait acheter du vin de Sauternes ; en 1787, le prince
de Saxe fait l’acquisition de bouteilles de vins de Haut-Barsac (sic) et de Haut-Prei¬
gnac (sic)*. Les vins de Sauternes en particulier sont dans les ann&es 1770-1780
très recherchés des élites parisiennes les plus fortunées*’. Mais on les retrouve aussi
ala fin du XVIII’ siécle dans des caves dijonnaises**. Ils sont aussi servis lors de
banquets donnés par les Capitouls de Toulouse dans les années 1780". Des vins de
Preignac sont expédiés en 1783 par le négociant bordelais Duprat à des négociants
de Marseille, au consul toscan de la ville et au procureur du parlement d’Aix°°.
À la même époque, les journaux d'annonces bordelais proposent de plus en plus
souvent la vente de bouteilles de vin d’Yquem, de Barsac ou de vin blanc « doux »
de Sainte-Croix-du-Mont°!. Dès les années 1790, Le Journal de Paris contient des
indications sur la vente de Sauternes. Des exemples nombreux attestent d’un en¬
gouement généralisé pour ces vins doux du Bordelais dans les dernières décennies
de l’Ancien Régime qui perdure dans les premières décennies du XIX® siècle à
la cour de Louis XVIII et sur la table de la duchesse de Berry, par exemple”.
Comme pour le Tokay, la renommée des vins de Sauternes est portée par de grands
personnages (prince Ferenc Rakéczi, comte de Lur Saluces) en France et en Eu¬
rope*. Dans une moindre mesure, les vins de Jurançon, de Clairac ou de Capbre¬
ton bénéficient aussi d’une certaine reconnaissance en France comme à l’étranger
sur le marché des vins doux. Cette diversification s'explique évidemment par les
transformations qui s’opèrent dans ces vignobles avec notamment le recours gran¬
dissant à des vendanges tardives**. Mais, leur place parmi les vins doux tient aussi
sans doute à des valeurs de consommation nouvelles chez des élites qui veulent se
démarquer à travers des vins de leur cru ou de lieux de production bien identifiés
et non plus recourir seulement à des vins étrangers accessibles à une partie un peu

46 Archives nationales, R 1/254, Dépenses et mémoires des fournisseurs du comte d'Artois (1774-1783) ;
Archives départementales de l'Aube, EE 3105, Etat des vins d’entremets envoyés à Paris (juillet 1787).

7 Sur la réputation de ces vins, voir Stéphanie Lachaud, « Les vins blancs doux et liquoreux du sud Gi¬
ronde : la construction des réputations », dans Stefano Magagnoli et Philippe Meyzie (dir.), La répu¬
tation des produits et des marques. Perspectives historiques, Presses universitaires du Septentrion, Ville¬
neuve-d'Asco, Presses du Septentrion.

# Loïc Albric, Les grands vins de Bourgogne de 1750 à 1870. Production, commerce et clientèle, Précy-sous-Thil,
éditions de l’Armangon, 2008, p. 405.

# Archives municipales de Toulouse, CC 2826, pieces a l’appui des comptes (1787).

% Archives départementales de la Gironde, 7 B 1652, correspondance du négociant bordelais Duprat,
lettre du 31 janvier 1783.

51 Annonces, affiches et avis divers pour la ville de Bordeaux ; Journal de Guyenne.

52 Archives nationales, 0/3/88, Archives de la Maison du Roi, service du Grand Maitre (1815-1829) ;
O/3/126, Fournisseurs de la Maison du Roi (1814) ; 371 AP 9, Comptes, factures et mémoires de la
duchesse de Berry (1817-1830).

3 Marguerite Figeac-Monthus, « Tokaj et Sauternes aux XVIII*-XIX* siécles. Une comparaison possible
entre deux vignobles », Histoire & Sociétés Rurales, n°35, 1* semestre 2011, p. 127-150.

4 Stéphanie Lachaud, Le Sauternais moderne. Histoire de la vigne, du vin et des vignerons des années 1650 a la

fin du XVIIF siècle, Bordeaux, Fédération Historique du Sud-Ouest, 2012.

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