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ffy, vers 1620 mais il faut attendre 1655 pour voir la Diéte ordonner obligatoire
la sélection des grains aszu'®. On sait par ailleurs, grâce à un inventaire de la cave
de Räkéczi, qu’il y avait déjà la présence de vins de ce type en 1635". Il reste à
savoir quand a été construite et développée cette histoire ? En France beaucoup de
légendes sont établies autour des vins et alcools aux XVITI-XIX siècles à l'instar
de la Marie Brizard?°. Transformer le passé pour vendre pas seulement un vin
mais aussi une histoire, ne serait-elle pas une stratégie commerciale ? Au-dela
il est intéressant d’établir ici une analogie avec ce qui se passe en Sauternais a la
même époque où l’on commence à pratiquer les vendanges tardives et à utiliser la
pourriture noble?!, Cela correspondrait-il à une demande plus forte des marchés ?
Seule une étude plus approfondie pourrait permettre de le prouver. À côté de cette
découverte du Tokay-aszu, d’autres histoires existent.
Au début du XIX:* siècle, dans le Bulletin des sciences agricoles et économiques Jung
raconte :
« Pendant le concile de Trente, plusieurs prélats, surtout ceux d'Italie, vantaient
le vin de leur patrie. Georges Drascowich, évêque de Colocza, soutint que
celui de Hongrie l’emportait sur tous les autres. Personne ne voulant le croire
sur parole, il fit sur-le-champ apporter un échantillon de vin de Tallya-Mada
(une des premières qualités de Tokay). Le Pape lui-même en goûta et déclara
hautement qu’il n'avait jamais rien bu de meilleur. Ceci arriva en 1562. Mais, le
tokay, a acquis une qualité bien supérieure depuis que l’on a adopté la méthode
de choisir le raisin??. »

Dans cet extrait on pourrait penser qu’il s’agit du vin de Tokay d’avant la décou¬
verte de la pourriture noble, or une expression prête à confusion « la méthode de
choisir le raisin », s'agirait-il comme dans l’azsü, de sélection de grains, d’un sys¬
tème de tries déjà existant ? Cette histoire retransmise au XIX* siècle et souvent
recopiée, interroge et contredit un peu la précédente. À cela se rajoute la décou¬
verte ou l’arrivée du Furmint (écrit Formint dans le texte) en Hongrie dont Albert
de la Fizelière nous rapporte au XIX‘ siécle :
« Le tokay, ce nectar des banquets royaux, est produit dans le comté de Zem¬
plin, sur les coteaux de Hegy-Allya, par un raisin connu sous le nom de For¬
mint, ce qui a fait supposer à quelques antiquaires, à Szirmay de Szirma, qui
a écrit sur ces matières, qu'il est originaire de Formies, cru tant célébré par
Horace. Ce qu’il y a de certain, c'est que plusieurs vignobles de Tokay furent

plantés avec des ceps rapportés de Malvasie en Morée par les Vénétiens, en
1241”. »

S.Bodnär, « Quality and origine protection of the tokay wines » In E.P.Botos, Vine and Wine économy.
Proceedings of the international symposium Kecskemét, Hungary 25-29 june 1990, Amsterdam-Ox¬
ford-New-York-Tokyo, Elsevier, 1991, p. 23
https://guideduvin.wein.plus/wine-regions/tokay-hegyalja-3 (consulté en septembre 2022)

2 Hubert Bonin, Marie Brizard, Bordeaux, L Horizon Chimérique, 1994.

Stéphanie Lachaud, Le Sauternais moderne. Histoire de la vigne, du vin et des vignerons des années 1650 à la
fin du XVIIIe siècle, Bordeaux, Fédération Historique du Sud-Ouest, 2012, p. 34-65.

MJ. Jung, Bulletin des sciences agricoles et économiques, tome XIII, Paris 1829, p. 126-127.

23 Albert de La Fizeliére, Vins a la mode et cabarets au XVIIe siècle, Paris, René Pincebourde éditeur,

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