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ANALYSE GEOPOETIQUE DE LA HERONNIERE ET L’HABITUDE DES BETES ennemis des villageois et des chasseurs. Pour comprendre cette menace, il faut d’abord comprendre ce que la chasse signifie dans l’ordre du village. La chasse est un élément central des nouvelles et du roman. Elle est une importante source de revenus pour le village. Souvent on parle d’une certaine fébrilité lors des périodes de chasse, le village se réveille et est envahi par les chasseurs. Cette chasse s'inscrit dans l’ordre du village, ce n’est pas une chasse pour la survie ou pour se nourrir, mais pour tuer. Elle ne fait pas partie des lois de la nature, elle n’est qu'une pure passion des hommes; des villageois et des citadins pareils. Cette passion partagée envers la chasse est le point de rencontre entre les étrangers et les villageois. La raison pour laquelle les locaux ne semblent pas être dérangés par l’arrivé des chasseurs c’est que la chasse décrit le rapport des villageois envers la nature qui est celui de la domination. Denise Paré dans son article « Habitats, migrations et prédations » mentionne deux autres rapports à la nature qui sont présentés dans La héronnière à côté de la domination: celui des urbains qui est la consommation et celui des néoruraux qui est la réappropriation (465-466). À ceux-ci s'ajoute un quatrième rapport dépeint dans L’habitude des bêtes que, faute de mieux, nous désignerons comme «naturel», c’est-à-dire «relatif à la nature ». Vindividu dans ce rapport « naturel» ne se voit plus dans un ordre hiérarchique par rapport à la nature où l’un doit rester en pouvoir pour ne pas périr, il se comprend plutôt dans l’ordre de la nature où l’homme n'est plus au sommet de la pyramide (structure vertical arborescente), mais fait partie de la toile complexe du monde naturel (structure horizontale rhizomatique). Deux des personnages principaux du roman participent d’abord à cette folie de la chasse et s’abandonnent à cette fébrilité, pour ensuite l’abandonner du jour au lendemain. Pour le narrateur, c’est l’arrivée d’un chiot qui sera à l'origine de ce changement: Dans ma vie, il y avait un avant-Dan et un aprèsDan. Bien que ça puisse paraître loufoque, son arrivée avait été plus importante que mon divorce » (Tremblay, L'habitude des bêtes 56). Pour l’autre personnage qui s'appelle Mina, c’est probablement l'ombre de la mort, de la fin de la vie qui va l’a détournée de la chasse. Le monde du narrateur est bouleversé par l’arrivée de Dan, un chiot qu'il reçoit d’un vieil Indien lors d’u n de ses trajets dans la réserve. Avant l’arrivée de Dan, il vit la vie habituelle des étrangers et des villageois qui tourne autour de la saison de chasse: En reprenant la route vers le chalet, j'ai vu que Dan s'était réveillé. Il était assis sur la banquette et regardais dehors. On était début septembre. La chasse allait commencer bientôt. Pendant des années, ça m'avait rendu fébrile. Je prenais deux semaines de congé. Je ne chassais que quelques jours. Le reste du temps, je transportais des chasseurs pour une pourvoirie. Il en venait de partout des États-Unis. .75 +