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CANADIAN LANDSCAPES/ PAYSAGES CANADIENS mythe de la stabilité de la garnison et de sa capacité de survivance a l’écart, dans la solitude, aboutit ici à un échec à cause du changement de la mentalité des villageois. Ces derniers ne parviennent plus à soutenir une garnison efficace et leur communauté commence à s'effondrer. Une rupture radicale s'opère avec le milieu rural d'avant, traditionnel et lié au terroir. La rupture est signalée par la dissolution des liens sociaux et de la collectivité, et culmine par un exode des villageois. La communauté n’est plus indépendante comme l’ötaient les forts. La nature, cruelle et activement hostile, l'emporte. Comme l'écrit Daniel Chartier: «Ainsi, l'hiver ouvre sur des territoires humains la possibilité du sacré et de l’initiatique : l’homme croit affronter la nature, mais il se rend vite compte que le seul véritable affrontement est intérieur » (18). Les personnages deviennent peu à peu habités par l’hiver. Les frontières entre l’intérieur et l'extérieur se brisent et le dehors envahit le dedans. La forêt y prend le rôle d’un mur de protection et d’un lieu mystérieux où l’on n'ose entrer en hiver que pour y bücher du bois. Cet imaginaire forestier d’une manière subtile forme les confins de l’univers du roman et le cadre spatial de la narration. Il est nécessaire pour établir la véridicité de l'univers créé, comme un lieu privilégié dans la littérature québécoise et l’imaginaire collectif des Québécois. Quant au troisième volet, Les ombres filantes, de prime abord, on peut dire qu'il s’agit d’un roman d'aventures, qui s'inscrit dans la veine post-apocalyptique, devenue un courant littéraire de la littérature québécoise contemporaine. Au dire de l’auteur : «Ce qui m'intéressait, c'était l’idée de survie relationnelle. Comment être soi à travers les dynamiques familiales, et continuer à l'être quand ce rôle ne nous sied plus » (Lapointe). Quant à la fin du monde nous le pouvons y penser à la manière de Jean-Michel Durafour qui réclame que: «La fin du monde n’est qu’une autre manière de penser et de vivre le monde. Loin de tout pessimisme, elle ne propose rien d’autre qu’un éclairage sur notre présent débarrassé du présentisme [...] en lui redonnant un avenir, c’est-à-dire un sens et une espérance » (17-18). Christian Guay-Poliquin n’use de ce motif que comme un arrière-plan, presque un prétexte à accompagner l’histoire qui l’intéresse vraiment, même s’il est question de la Panne et des hommes qui tentent de sauver leurs vies par tous les moyens possibles. Si le protagoniste traverse la forêt, c’est pour rallier le camp de chasse de sa famille. Il espère y retrouver ses oncles et tantes, mais aussi une forme de bonheur liée à son passé, car il garde de ce lieu de beaux souvenirs d'enfance. Ce retour à l'enfance s’inscrit également dans la relation qui unit le narrateur à Olio. Leur union transforme un compagnonnage de circonstance en amour paternel et filial. La fin du roman, encore une fois ouverte, nous permet de croire qu'un quatrième roman pourrait s'ajouter au cycle. +30 e