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CANADIAN LANDSCAPES/ PAYSAGES CANADIENS LE POIDS DE LA NEIGE Dans le village, la coupure du courant électrique représente pour ses habitants une invitation au retour à un mode de vie de garnison, car poursuivre la vie urbaine n’est plus possible, comme le démontre la description du décor post-apocalyptique dans les villes: voitures abandonnées, pillages, édifices fumants, attroupements et agitations. Au contraire, le village natal du narrateur semble offrir une chance de survie, protégé, qu’il est, par son éloignement et situé à l'abri au milieu de la forêt, qui forme un mur de protection et une frontière entre deux mondes. S'instaure ainsi une tension entre un monde sécurisé et un autre monde menaçant se trouvant au-delà, mais aussi entre un monde peuplé, le village, et un monde désert, la forêt. Le village du Poids de la neige évoque une nostalgie d’un monde d'antan et incarne un endroit hors du danger, habité par des paysans archaïques aux noms bibliques, où on peut échapper à la civilisation. Guay-Poliquin y reprend l'imaginaire récurrent dans la littérature canadienne des «[...] communautés petites et isolées entourées par une frontière physique ou psychologique [...]» (Frye 225). La garnison du village représente un endroit où on peut survivre malgré, ou grâce à l'isolation d’un paysage hostile qui l'entoure et son vide menaçant. La colonisation et la survivance auraient donné naissance à un fort «[...] sentiment de l’aliénation qui s'empare de l’homme obligé à s'installer dans un espace inconnu et hostile [...] » (Gyurcsik 45) et qui transcende alors la nécessité de communautarisme et d’autosuffisance qui sont liés 4 la mentalité de garnison. L'action Du poids de la neige place d’emblée le lecteur dans le huis clos d’une cabane. Arrivé au village qu’il voulait atteindre dans Le fil des kilomètres, le narrateur a un accident de la route dont il sort grièvement blessé. En échange de vivres et d’une place dans un convoi qui partira pour la ville au printemps, Matthias, un vieil homme piégé dans le village, a pour mission de le soigner, car le narrateur est désormais le seul mécanicien dont le village dispose. Étouffés par l’immobilité hivernale, également symbolisée par la perte de mobilité du héros en raison de sa blessure, Matthias et le narrateur doivent survivre ensemble à la cruauté de l’hiver et attendre l’arrivée du printemps, qui symbolise un espoir de renouveau. Dans le chalet, nous y avons à la fois une convivialité entre les hommes isolés qui vivent une sorte du mythe de l'Amérique d’une cabane à part de tout cela ala maniére de Walden de Thoreau (Frye 241) et la lutte de survie de l’autre côté. Quand la nature est calme, ils s’adonnent à la cuisine ou au jeu d'échecs, sinon ils souffrent du mal d’enfermement. Leur traumatisme de réclusion ou cabin fever comme il est appelé en anglais et où nous entendons le mot cabane, que le dictionnaire définit comme: « Tension nerveuse résultant d’une longue et rigoureuse réclusion » (Office québécois), représente un autre obstacle qu’ils + 26 +