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KATA GYURIS En reconnaissant la mythologie et la culture des peuples africains comme supérieures, Le Clézio donne une margue ineffacable aux hommes blancs, un manque profond qui les rend étrangers sur ce continent qu'ils cherchent à exploiter. Même si c’est un signe visible sur la peau, il ne s’agit pas d’une difference superficielle, c'est plutôt une différence à la fois corporelle et spirituelle, deux caractéristiques que l’on trouve cette fois très difficile à séparer l’une de l’autre. D'autant plus spirituelle qu’il semble que ces indigènes tant méprisés par les colonisateurs possèdent quelque chose de transcendant en eux que les européens ne peuvent jamais expliquer. Malgré tous les désenchantements, Maou, en tant qu'étrangère elle aussi, reconnaît cette qualité en ces gens: « Jamais elle n'avait aimé personne comme ces gens. Ils étaient si doux, ils avaient des yeux si lumineux, des gestes si purs, si élégants! » Cette qualité est également reconnue dans L’Africain, mais la, tout est interprétable en relation avec le corps, non seulement l’espace mais encore les caractères. Dans cet essai Le Clézio montre le début de l'expérience coloniale où tous les sentiments ont une force novatrice et finalement une connotation positive. Le corps de l’auteur s’unit avec le corps de l’Afrique et même les incidents fastidieux deviennent des lieux d'apprentissage et de fascination: «L'Afrique, c'était le corps plutôt que le visage. [...] Le premier souvenir que j'ai de ce continent, c'est mon corps couvert d’une éruption de petites ampoules causées par l'extrême chaleur, une affection bénigne dont souffrent les Blancs à leur entrée dans la zone équatoriale, sous le nom comique de « bourbouille » — en anglais prickly heat.» La maladie légère de Le Clézio est présentée comme quelque chose de bienveillant, qui contribue à l’approfondissement de cette expérience énorme. Ce n’est pas seulement le continent et la terre qui deviennent un corps énorme, mais les êtres humains sont également réduits au statut d’un corps vivant et sensuel. Cependant, cette « réduction » n’est pas un processus négativement présenté. Au contraire, le fait que les personnages dans la vie du jeune Le Clézio soient privés de leur individualité signifie un retour au début où les différences entre colonisé et colonisateur n’existaient pas, où tout le monde était un seul corps. Ce sentiment surgit encore une fois quand le protagoniste remarque une vieille femme au milieu de la rue. Comme tous les enfants, il est curieux de savoir ce qui se passe avec cette femme et plus particulièrement pourquoi elle est si différente des autres : « Le corps nu de cette femme, fait de plis, de rides, sa peau comme une outre dégonflée, ses seins allongés et flasques, pendant sur son ventre, 16 Idem, p. 144. 17 LAfricain, p. 16. + 224 +