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KATA GYURIS par l’intervention coloniale dans la tranquillité d’Afrique, cette idylle devient très vite une expérience fastidieuse où s’entremêlent le désenchantement et le vide du quotidien : « Elle [Maoul] n'avait pas pensé que ce serait comme ceci, les journées longues et monotones, l'attente sous la varangue, et cette ville aux toits de tôle bouillants de chaleur’. » Dans L’Africain, Le Clézio opte pour la perspective des indigènes. Pour lui, l'Afrique est très difficilement séparable de ses habitants, il la construit comme un corps énorme palpitant et plein de vie. Quand il arrive en Afrique avec son père à l’âge de huit ans, sa perception et découverte de soi-même s’entremêle avec son initiation magique dans ce continent plein de mystère. On peut découvrir les mêmes expressions qu'il avait utilisées dans Onitsha: «T[...] c'était la liberté totale du corps et de l'esprit. Devant la maison, dans la direction opposée à l’hôpital où travaillait mon père, commençait une étendue sans horizon, avec une légère ondulation où le regard pouvait se perdre®.» Même si cet espace se transformera en un lieu de souffrance et de guerre — tout comme dans Onitsha —, ’innocence extatique de la terre africaine reste une voix résonnante au cours des deux romans. Les expériences presque extatiques du jeune Le Clézio naissent du fait que son père a une profonde aversion contre le colonialisme et a une forte conviction que la vraie image de l'Afrique n’est pas connaissable dans sa représentation coloniale, c’est-à-dire que « la zone civilisée » ne montre pas la vérité d'Afrique’. La plupart des colonisateurs ne connaissent que cette zone mais le père de Le Clézio ose pénétrer la réalité de l’Afrique et par conséquent, il voit comment les traces de l'occupation britannique et française pèsent encore. La critique primaire dans Onitsha consiste en fait à démontrer le manque de cette considération non-coloniale, la supposition que l'empire coloniale britannique a primauté toujours et partout. C’est l’idéologie que Maou et Fintan, les nouveau-venus européens détestent, ce qui les marquera comme des étrangers parmi les indigènes et les colonisateurs aussi. Une critique directe de la colonisation vient d’un des officiers anglais dans un ton aussi ironique que désenchanté. Quand il dit: « Nous sommes des colonisateurs, pas des bienfaiteurs de l’humanité” », ily condense la négation de la propagande de toute colonisation et un peu d’autoréflexion sur la naiveté des jeunes officiers. 7 Le Clézio, op. cit., p. 73. 8 LAfricain, p. 19. ° Isabelle Roussel-Gillet, « Plages-mémoire de J. M. G. Le Clézio». L'Esprit créateur, vol 51, n°2, 2011, p. 81-96, 92. 10 Onitsha, p. 172. * 222 ¢