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« UNE NUEE DE SAUTERELLES APPORTEE PAR LE VENTA CINQ HEURES DU SOIR » entrevues. »°! Après « nettoyage », « balayage », brouillage de l’organisation figurative préexistante, l’artiste se trouve dans une sorte de chaos-germe, un chaosmos qu’est le diagramme. Agissant en modulateur et non plus comme un moule ou un calque, le diagramme «ingère », « digère », « redistribue », tout en brisant les coordonnées spatio-temporelles en vue de dégager mots, lignes, couleurs et perspectives devant le sujet nomade à venir”. Ce faisant, il fait transiter ses drôles de sujet, ses « devenirs-imperceptibles », ses « devenirs nonhumains» qui sont comme autant d’affects de l’espace lisse, enveloppés paradoxalement dans le lisse des plis où la perception cesse d’être optique. Aucune distance n’y est sollicitée, on n’y mesure plus l’espace strié des appareils d'état et ses points de vue. De même pour les «lignes sauvages » qui fuient dans l’espace lisse sans se soumettre aux points (au point de vue). On comprend que l'événement est tributaire d’une perception «haptique » et produit son sujet multiple: un nomade, un corps sans organes, «un voyant », «un entendant », «un devenant» qui ne cesse de rouler dans l’espace sensible pour y creuser un habitat, s’y reterritorialiser rien que pour inventer des affects et des percepts inédits, déterritorialisants. La vision rapprochée fait sensation : percepts et affects. Du sensationnel à la sensation : acharné à avoir une « Maison » ET toujours à la recherche d’un « Univers ». « C’est comme un passage du fini à l'infini, mais aussi du territoire à la déterritorialisation. C’est bien le moment de l'infini: des infinis infiniment variés®, » Linterrogation de la philosophie de l'événement de Gilles Deleuze nous révèle quelque chose de fondamental sur l’œuvre d'art et l’état de chose dans lequel elle se conserve. « Ce qui se conserve, la chose ou l’œuvre d'art, est un bloc de sensations, c'est-à-dire un composé de percepts et d'affects**. » Essentiellement événementielle, l’œuvre d’art ne deviendra donc jamais un objet quelconque, sans cesser pour autant de devenir, de s’inventer dans des variétés virtuelles, des agencements inédits, avec l'artiste qui « déborde les états perceptifs et les passages affectifs du vécu ». En effet, «on n’est pas dans le monde, on devient avec le monde, on devient en le contemplant. Tout est vision, devenir. On devient univers. Devenir animal, végétal, moléculaire, devenir zéro‘. » 51 Ibidem, p. 172. 52 Cf. Gilles Deleuze, Francis Bacon. Logique de la sensation. Paris, Seuil, 2002, en particulier le chapitre 12 « Le diagramme », p. 93-103. 53 Ibidem, p. 171, en italique dans le texte. 54 Ibidem, p. 154, en italique dans le texte. 55 Ibidem, p. 160. e 175 +