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Timea Gyimesi « Une nuée de sauterelles apportée par le vent à cinq heures du soir!» - contempler l’infini(tif) avec Gilles Deleuze « [...] 4 condition que tout cela s'ouvre et s’élance sur un vecteur fou comme un balai de sorcière, une ligne d’univers ou de deterritorialisation? » Le simple fait de passer en revue les thématiques des colloques littéraires des dernières décennies et la liste des ouvrages théoriques et scientifiques consacrés a la notion d’infini nous permet de constater que ce concept reste bien l’un des lieux où artistes, philosophes et scientifiques ne cessent d'échanger matière à réflexion et inspiration. Aussi cette attention portée à l'infini traduit-elle l'envie des sciences humaines de voir leurs investigations et recherches prolongées dans des zones extérieures, exogènes. Il suffit de penser au geste philosophique de Gilles Deleuze de vouloir cerner «la pensée comme hétérogenèse‘» dans la perspective d’un dehors (d’ «un peuple à venir” ») pour comprendre que l’interrogation des limites disciplinaires contribuera à porter un éclairage sur l'infini étant donné la place irréductible que cette notion occupe dans la mise en œuvre de toute forme de connaissance. 1 Gilles Deleuze — Félix Guattari, Capitalisme et schizophrénie 2. Mille plateaux. Paris, Ed. Minuit, 1980, p. 320. [désormais MP] 2 Gilles Deleuze — Félix Guattari, Quest-ce que la philosophie ? Paris, Ed. de Minuit, 1991, p. 175. [désormais QPh] 3 V. la préface de Ronald Shusterman (dir.), L'Infini. Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2002; v. aussi Pierre Schneider, Petite histoire de l'infini en peinture. Paris, Hazan, 2001; Revue collective Fini et infini. Le genre Humain n° 24/25, Paris, Seuil, 1992, etc. * V. QPh, p. 188. 5 La géophilosophie de Deleuze et Guattari fait appel à la phrase de Paul Klee sollicitant un « peuple qui manque » pour conceV. le dehors de la pensée, un devenir. V. MP, 416. Pour le « peuple à venir »: «Le poète au contraire est celui qui lâche des populations moléculaires dans l'espoir qu’elles ensemencent ou même engendrent le peuple à venir, qu’elles passent dans un peuple à venir, qu’elles ouvrent un cosmos.» MP, 427. Ou bien: « Le devenir est toujours double, et c’est ce double devenir qui constitue le peuple à venir et la nouvelle terre. [..] L'artiste et le philosophe sont bien incapable de gérer un peuple, ils ne peuvent que l’appeler... » QPh, 105. * 166 +