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LE TEMPS COMME FORME DE LA CONTEMPLATION - PERSPECTIVES PHENOMENOLOGIQUES possible l’appréhension d’un objet quelconque. La rétention prend donc la forme d’un processus immanent qui a pour fonction de conserver continûment les données constitutives de notre champ perceptuel. De ce point de vue, l'extension temporelle (ou «flux dynamique de la durée ») doit être entendue comme le corrélat nécessaire de l'extension spatiale ; en effet, la dynamique rétentionnelle rend possible l’auto-manifestation des objets aussi bien immanents que transcendants par la conservation de leurs caractéristiques élémentaires dans un laps de temps suffisamment important pour que la présence desdits objets soit toujours perceptible et forme un milieu relativement homogène et stable, en l'occurrence l’espace. Le mécanisme de la rétention a donc ceci de particulier qu’il détermine le champ du perçu, ou plus exactement, du perceptible en general: « Le terme de « perception » a du reste encore besoin de recevoir ici quelque éclaircissement. S'agissant de la « perception de la mélodie », nous distinguons le son donné maintenant, que nous nommons son « perçu », et les sons qui ont passé, que nous nommons « non-perçus ». D'un autre côté, nous nommons la mélodie dans son ensemble, mélodie perçue, bien que seul pourtant soit perçu l'instant présent. Nous procédons ainsi parce que l'extension de la mélodie n’est pas seulement donnée point pour point dans une extension de la perception, mais l’unité de la conscience rétentionnelle « maintient » encore les sons écoulés eux-mêmes dans la conscience et, en se poursuivant, produit l'unité de la conscience qui se rapporte à l’objet temporel dans son unité, à la mélodie. Une objectivité du genre d’une mélodie ne peut pas être « perçue », donnée elle-même originairement, autrement que sous cette forme. L'acte constitué, édifié à partir de la conscience du maintenant et de la conscience rétentionnelle, est la perception adéquate de l’objet temporel". » Le souvenir, ou pour employer la terminologie plus précise de Husserl, le «souvenir primaire » (ou «rétention»), n’est pas une simple reproduction de l'objet perçu, (c'est en cela qu’il faudra distinguer « ressouvenir » et « rétention»), mais constitue plutôt ledit “objet” en déployant continüment dans le temps les singularités qui le caractérisent. La rétention est donc l'acte éminemment structurant de la conscience, et plus généralement, de la perception: « Mais si nous nommons perception l'acte en qui réside toute origine, l'acte qui constitue originairement, alors le souvenir primaire est perception. Car c'est seulement dans le souvenir primaire que nous voyons le passé, c’est 12 Ibidem, p. 54. + 123 +