OCR
ÉvA MARTONYI auteurs du 20° siecle. Bien sûr, le titre de l’œuvre monumentale de Victor Hugo, Les Contemplations, est également souvent mentionnée a titre d’illustration. Contemplation et l’appel de l’infini chez Victor Hugo Lattitude romantique de Victor Hugo par rapport à l’acte de la contemplation peut étre illustrée d’une facon convaincante par le volume poétique tardif et monumental, rédigé pendant plusieurs décennies et publié enfin sous le titre Les Contemplations®. Chez le grand poète du 19° siècle, on retrouve tous les éléments des définitions mentionnées, non seulement présents en tant qu’une matière poétique extrêmement riche mais aussi en tant qu’une source philosophique faisant partie d’une philosophie personnelle, nourrie d'expériences vécues et d’une attitude visionnaire embrassant pratiquement toute la culture passée et présente de l'humanité. Dans l'introduction des Contemplations, Victor Hugo écrit ceci: « Qu'est-ce que Les Contemplations ? C’est ce qu'on pourrait appeler, si le mot n’avait quelques prétentions, Les Mémoires d’une âme. » En se remémorant les moments de son passé, Victor Hugo songerait-il à composer ce qui pourrait être compris comme ses Mémoires ? Cette allusion aux Mémoires d’une âme dans la citation précédente pourrait-elle être considérée comme l'écho lointain des Mémoires d’Outre-tombe de Chateaubriand ? Toujours est-il que chez Hugo le temps qui passe joue un rôle important aussi bien au niveau individuel que collectif. Puis, il continue: «C'est l'existence humaine, sortant de l'énigme du berceau et aboutissant à l'énigme du cercueil; c'est un esprit qui marche de lueur en lueur en laissant derrière lui la jeunesse, l'amour, l'illusion, le combat, le désespoir, et qui s’arréte éperdu au bord de l’infini. Cela commence par un sourire, continue par un sanglot, et finit par un bruit de clairon de l'abime’. » Dans un des poèmes du chapitre intitulé Autrefois, chapitre qui contient les œuvres nées entre 1830 et 1843, le poète se présente en contemplant la mer : «Un jour je vis, debout au bord des flots mouvants, / Passer, gonflant ses voiles, / Un rapide navire enveloppé de vents, / De vagues et d'étoiles », il entend une voix mystérieuse qui lui dit: « Poète, tu fais bien ! Poète au triste front, / Tu rêves près © Pour les citations v. Victor Hugo, Les Contemplations. Œuvres complètes. Poésie II. coll. Bouquins, R. Laffont, Paris, 1985. 7 Victor Hugo, op. cit., p. 249. * 106 +