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CONTRASTE SUR LE RAPTUS permet de représenter le raptus: il s’agit d’une expérience naturelle de la nature humaine, imposée cependant avec une modalité non-naturelle!!. Le raptus s'accompagne d’un état d’aliénation!?: l’intellect étant complètement absorbé par l'intelligence de l'essence divine, la sensibilité s’en retrouve comme éteinte. Cette séparation de l’intellect du corps est cependant moins radicale de celle qui se vérifie au moment de la mort corporelle; l’âme intellective enlevée (rapta) continue en fait d’être la forme du corps charnel. Son action est tout de même complètement séparée des puissances cognitives qui permettent, dans des conditions ordinaires, le processus cognitif de l’intellect. Pour connaître l'essence divine, l’intellect doit être complètement séparé des facultés qui sont susceptibles d'empêcher son activité, à savoir les facultés qui constituent l’âme sensitive : ces facultés fournissent à l’intellect les images dont celui-ci a besoin pour penser, et puisque Dieu ne peut pas être connu par le moyen d’une image, l’âme sensitive ne doit pas participer à l'opération qui consiste à connaître intellectuellement l'essence divine. En revanche, l’intellect n’a pas besoin d’être séparé des facultés dont le fonctionnement, toujours dans des conditions ordinaires, ne peut pas déranger l’intellect, à savoir celles qui constituent l’âme végétative. Le fait de respirer, par exemple, ne demande aucune concentration intellectuelle. Pour ces raisons on ne peut pas parler, dans le cas du raptus de Paul, d’un état de mort, mais uniquement d’une aliénation temporaire des facultés sensitives. Lame végétative peut fonctionner, alors que la sensibilité doit être suspendue. 1 Thomas de Aquino, Quaestiones disputatae de veritate, 13, 1, ad 5m (Édition Léonine t. 22, p. 418, 237-242; tr. fr. citée) : « Et cependant, on ne peut pas tout à fait dire qu’il y a violence, sauf au sens où l’on parle de mouvement violent quand une pierre est lancée vers le bas plus vite que le mouvement naturel ne la dispose; mais au sens propre, “est violent ce à quoi le patient ne contribue nullement”, comme il est dit au troisième livre de l’Ethique » (« Nec tamen potest dici omnino esse violentia nisi sicut dicitur motus violentus quando lapis deorsum proiicitur velocius quam sit dispositio motus naturalis ; proprie tamen “violentum est in quo nihil confert vim patiens’, ut dicitur III Ethicorum »). La définition de ‘violent’ qu’on lit ici est tirée d’Aristote, Eth. Nic. II, 1110b15-17. 2 Les termes du lexique latin sont: abstractio, alienatio, absolutio, auersio. 33 Thomas de Aquino, Summa theologiae, I II, 175, 5, responsio (Edition Léonine t. 10, p. 407; tr. fr. Editions du Cerf, Paris, 2005): « Dans le ravissement [...] homme [...] est élevé par la puissance divine de ce qui est selon la nature à ce qui est au-dessus de la nature. I faut donc considérer deux choses: 1° ce qui convient à l’homme selon la nature; 2° ce que la puissance divine doit faire en l’homme au-dessus de sa nature. Or, l'âme étant unie au corps comme sa forme naturelle, il en résulte chez elle une tendance naturelle à comprendre par un retour aux images. Cette tendance n’est pas abolie par la puissance divine dans le ravissement, car l’état de l’âme n'est pas changé [...]. Toutefois, tandis que cet état demeure, le retour en acte vers les images et les réalités sensibles est retiré à l'âme afin qu'il n’y ait point d’obstacle à son élévation vers ce qui [...] dépasse toute image [...]. Par conséquent, dans le ravissement de S. Paul, il ne fut pas nécessaire que son âme fût séparée de son corps au point de ne plus lui être unie comme sa forme ; mais il fallut que son intelligence fût abstraite des images et de la perception des réalités sensibles » (« in raptu [...] de quo nunc loquimur, virtute divina elevatur homo ab eo quod est secundum naturam in id quod est supra naturam. Et ideo duo « 47 «