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rement les consuls en poste en Italie ou en Grèce pour obtenir du vin du Chypre”. Pour une bonne partie d’entre eux, les vins doux restent des vins de luxe, symbole de raffinement et de délicatesse, servis en petites quantités, qui répondent à une recherche socialement distinctive, dans les nourritures comme dans les boissons, des saveurs sucrées qui font le « bon goût « du siècle des Lumières en Europe". Vins sucrés et modes culinaires : un mariage de saveurs Ce goût pour les vins doux s'inscrit dans un système culinaire, un certain nombre de valeurs et d’usages, qu’il convient à présent de souligner, dont les évolutions notables au cours de la période participent de la valorisation de vins doux aux saveurs différentes. En France, la cuisine française servie à Paris, à la cour et dans les riches demeures de provinces connait des changements importants à partir de la seconde moitié du XVITE siècle, ouvrant la voie à de nouvelles formes de distinction culinaire. Au XVIII siècle, la cuisine prône délicatesse et raffinement. Dans la préface de la Science du maître d'hôtel (1749), Menon met en exergue l’idée de délicatesse à la fois du côté des cuisiniers, mais aussi de ceux qui doivent être capables d’apprécier ces nourritures subtiles : « La Cuisine substitue les parties grossières des alimens, dépouille les mixtes quelle employe, des sucs terrestres qu’ils contiennent : elle les perfectionne, les épure, & les spiritualise en quelque sorte. Les mets qu’elle prépare, doivent donc porter dans le sang une plus grande abondance d’esprits plus purs & plus déliés. De-la plus d’agilité & de vigueur dans les corps, plus de vivacité & de feu dans l'imagination, plus d’étendue & de force dans le génie, plus de délicatesse & de finesse dans nos goûts »*°. Dès lors émerge dans le domaine de la gastronomie la figure de l'amateur, semblable à ce que l’on retrouve au même moment dans le domaine de l’art“. Chez les élites, il convient de faire preuve de bon goût en étant capable de distinguer la qualité d’un mets ou d’un vin. Cette évolution dans l’univers culinaire concourt à la valorisation de vins à la douceur moins prononcée que les vins méditerranéens (style muscats). En 1787, selon le voyageur François Marlin, « nous n'avons, en vin 103. % Alain Blondy, Documents consulaires. Lettres reçues par le chargé d'affaires du Roi à Malte au XVIIF siècle, 5 tomes, La Valette, Fondation de Malte, 2014. % Jean-Louis Flandrin, « La distinction par le goût », dans Philippe Ariès et Georges Duby (dir.), Histoire de la vie privée des Français de la Renaissance aux Lumières, Paris, Le Seuil, 1986, p. 267-309. 3° Menon, La Science du maître d'hôtel cuisinier, avec des observations sur la connaissance et propriétés des alimens, Paris, 1749, p. XXII. #2 Charlotte Guichard, Les amateurs d'art à Paris au XVIIF siècle, Seyssel, Champ Vallon, 2008. 91