OCR
vins, et il en existe un à Tokay qui renferme en ce moment la meilleure liqueur de ce vignoble. Un autre se trouve à Bude, chez M. Magofi, qui l’a rempli de vin ordinaire. Le gouvernement a de grands celliers pour la conservation de ses vins, à Gyoengyoes (Gyöngyös), situé sur une ramification détachée de la chaîne des Carpathes. La principale pièce de ces celliers est taillée tout entière dans une roche de trachyte, sur une longueur de 194 m, 903, et sur une hauteur et une profondeur proportionnées. Les vins ordinaires y sont déposés dans de grands vases qui contiennent de 100 jusqu’à 500 sceaux”. On préfère ces grands vases, parce que pour une même capacité, leurs surfaces sont moins étendues que celles des petites barriques, et leurs parois sont plus épaisses, ce qui forme un double obstacle à l’évaporation et à la déperdition du liquide. Un autre propriétaire de la même ville a établi au milieu de son cellier, de forme entièrement circulaire, une glacière autour de laquelle on dispose sur des tablettes les bouteilles qui contiennent les vins les plus précieux, tandis que les autres sont mis dans des tonneaux qu’on range sur les chantiers qui règnent le long des parois’”. » En Hongrie, comme dans l’ensemble des autres pays européens, on s'interroge beaucoup sur la conservation. Il faut replacer cela dans le contexte scientifique d’une époque où on réfléchit de plus en plus à la place du sucre dans la fermentation et à son rôle dans la conservation. Les observations que les scientifiques font de manière empirique, sont progressivement théorisées à la fin du XVIII siècle et au début du XIX siècle par Adamo Fabbroni, par l'Abbé Rozier et par Antoine Chaptal®*. Les Etudes sur le vin ses maladies, causes qui les provoquent. Procedes nouveaux pour le conserver et pour le vieillir de Louis Pasteur”, ouvrage qui paraît sous le Second Empire oü l’auteur s’interesse au sucre dans le processus de fermentation et à la question de la conservation, fait référence à tous les travaux antérieurs qui sont cités dans son ouvrage. Garder le vin sur une durée plus ou moins longue a toujours été sous l’Ancien Régime un enjeu, à Tokay ceux-ci se conservent naturellement grâce à leur forte teneur en sucre et en alcool, d’où leur prix. Au-delà, on retrouve le même phénomène en Sauternais et l’ensemble des vignobles français où lon produit des liquoreux®. > 1 seau : 0,5650 hectolitre. 57 Théodore Fix, « De la culture des vignes, et préparation du vin, en Hongrie », rubrique cenologie, in, Le cultivateur, Journal des progres agricoles et Bulletin du cercle agricole de Paris, année 12, Paris, septembre, 1840, p. 523-524. Abbé Rozier, de la fermentation des vins et la meilleure manière de faire l'Eau-de-vie, mémoires qui ont concouru pour le prix proposé en 1766 par la Société Royale d'Agriculture de Limoges pour l'année 1767, Lyon, Frères Perisse, 1770, Fabbroni (Adamo), L'art de faire du vin, Paris, Marchant, 1801 ; Louis Pasteur, Études sur le vin ses maladies, causes qui les provoquent. Procédés nouveaux pour le conserver et pour le vieillir, Paris, imprimerie impériale, 1866. Marguerite Figeac-Monthus, « Tokaj et Sauternes aux XVIIIe et XIXe siècles : une comparaison possible entre deux vignobles ? », Histoire et Sociétés Rurales, n°35, 1er semestre 2011, p. 127 — 150. FigeacMonthus, "Clairac et Sauternes, étude comparée de deux vignobles à vendanges tardives aux XVIII-XIX: siècles", Colloque Roger Dion, Société de géographie, janvier 2009. Publié sous la direction de Jean-Robert Pitte dans Le bon vin. Entre terroir, savoir-faire et savoir-boire. Actualité de la pensée de Roger Dion, Editions du CNRS, Paris, 2010, p. 149 — 160. 58 59 60 29