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Cette idée du rôle dynamique des Vénitiens revient souvent dans les ouvrages du XIX" siecle à quelques nuances près car les auteurs se recopient et transforment leur information d’origine. Ainsi, le géographe Malte Brun raconte la même histoire en 1826, paru pour la première fois en 1810, quarante ans avant le texte d’Albert de la Fizelière’*. Cette implantation italienne est vraisemblable et ces histoires nous montrent l'existence d’une évolution lente : on découvre d’abord un cépage convenant au pays, puis les vendanges tardives, puis le bozrytis cinerea responsable de la production de ce vin de liqueur. La légende des grains d’or que l’on retrouve également dans plusieurs ouvrages est tout aussi intéressante : « Un vigneron déclara un jour qu’il avait vu de l'or dans les grains d’un raisin de Tallya-Mada, le meilleur cru de Tokay. Tout le monde le crut, et les convives des princes de HongrieŸ. » et de nous dire plus loin enlevant ainsi toute sa poésie à l’histoire : « le savant Szirmay prouva enfin que cet or végétal dans les raisins n’était autre que l'œuf d’un insecte autour, duquel le sucre du raisin s'était comme cristallisé?f. s Ainsi, en 1766, Jean-Baptiste Robinet essaie déjà d'expliquer de manière rationnelle la présence de grains d’or dans les baies de raisin”. Toutes ces histoires sont colportées par les élites européennes qui ajoutent au plaisir de boire, le plaisir de croire, celui de se laisser convaincre par une belle légende et ce jusqu'au XIXe siècle. Le rôle de la noblesse et des cours européennes La viticulture est liée en général aux lois du marché et obéit à un mécanisme essentiel : l'offre et la demande. Très tôt à Tokay le vin n'est pas réservé à une consommation locale, bien au contraire, c’est une production destinée d’abord à une riche aristocratie puis exportée, mais pour développer l'exportation il faut donner l’envie d’acheter et savoir repérer les lieux où le tokay pouvait être acheté. Sous l'Ancien Régime en effet, pour qu'un vin soit apprécié de tous, il fallait qu’il soit renommé et pour qu’il soit renommé il fallait qu’il soit connu dans les cours européennes, car les modes, qu'elles soient alimentaires, culinaires ou vestimentaires étaient « fabriquées » par les souverains. Le rôle d’un Ferenc II Rakôczi est resté, à ce titre, célèbre dans l’histoire. Le tokay issu des nombreux domaines de ce prince sert les diplomates hongrois qui, lors des négociations, offrent du vin à leurs homologues. Cela constitue une aide non négligeable lors des discussions. Ainsi, au début du XVIII siècle, les Rakéczi ont comme clients des seigneurs polonais et baltes, le 1866, p. 26-27. Conrad Malte-Brun, Géographie universelle ou description de toutes les parties du monde sur un plan nouveau, T. 3, Description de l'Europe, Paris, Garnier frères éditeurs, 1826, p. 312. 5 Albert de La Fizeliére , Vins à la mode et cabarets au XVIIe siècle, Paris, René Pincebourde éditeur, 1866, p. 28-29. 26 Ibid. 27 Jean-Baptiste Robinet, De Ja Nature, tome IV, Amsterdam, 1766, p. 181. 19 4 D 20